Pour Emmanuel Macron, remettre la République en marche
Avec Emmanuel Macron, les rentrées politiques vont crescendo. En 2022, réélu mais dépossédé de la majorité absolue, il lançait un Conseil national de la refondation -- CNR, comme en 1943 -- pour penser les politiques publiques. En 2023, passé près de la censure sur la réforme des retraites, il conviait les chefs de partis pour une discussion de 12 heures à Saint-Denis. En 2024, la crise politique est déclarée et la rentrée s'effectue vendredi à l'Elysée.
La France connaîtra-t-elle la semaine prochaine son nouveau Premier ministre ? Plus de six semaines après le second tour des législatives, Gabriel Attal est toujours à Matignon.
Chargé, depuis le 16 juillet, d'expédier les affaires courantes, il vient d'envoyer les lettres-plafond octroyant les crédits aux ministères, afin, a expliqué Matignon, que la prochaine équipe gouvernementale puisse présenter un budget. "Un pur scandale", "hallucinant", "un coup de force", tempête la gauche, en dénonçant la poursuite d'une politique "d'austérité".
Jamais un président n'avait pris autant de temps pour nommer un chef de gouvernement après des élections législatives. Mais jamais non plus l'Assemblée, fragmentée, n'avait aussi peu laissé entrevoir de majorité. "Une Assemblée qui rompt totalement avec les habitudes de la Ve République. Personne ne sait trop comment l'appréhender", observe un des négociateurs.
Emmanuel Macron, qui avait invoqué une "trêve politique" pendant les Jeux olympiques, a laissé passer les commémorations de la Libération de Provence avant de convoquer les leaders politiques et parlementaires à l'Elysée.
Le Nouveau front populaire et sa candidate pour Matignon, Lucie Castets, ouvriront le bal vendredi matin, tandis que la droite de Laurent Wauquiez se présentera dans l'après-midi.
Marine Le Pen, Jordan Bardella et Eric Ciotti, qui n'ont aucune intention de participer à un quelconque gouvernement de coalition, seront reçus lundi. Et "la nomination d'un Premier ministre interviendra dans le prolongement de ces consultations, et de leurs conclusions", a fait savoir l'Elysée.
-"C'est le problème de Macron"-
A gauche, ces rencontres interviennent au moment des traditionnelles universités d'été. Lucie Castets s'exprimera la veille chez les écologistes, puis le soir même de sa rencontre avec le président chez les communistes et le samedi chez les Insoumis.
Une tribune adéquate pour tenter d'accentuer la pression sur Emmanuel Macron, sans oublier les divergences stratégiques au sein du Nouveau front populaire avec la menace, guère goûtée par ses partenaires, de destitution du président brandie par Jean-Luc Mélenchon.
Si le président campe sur son refus du NFP -- la censure d'un gouvernement Castets comprenant des ministres insoumis "est acquise, c’est arithmétique", répète-t-on au sommet de l'exécutif --, qui pour Matignon ?
Au centre, le camp présidentiel n'ose s'avancer. A droite, l'accord scellé avec Les Républicains de Laurent Wauquiez a permis la reconduction de la présidente sortante Yaël Braun-Pivet, mais LR a aussi nettement écarté la perspective d'un accord de gouvernement.
D'autres à droite, sont plus ouverts. Et des noms circulent... jusqu'au centre-gauche. "Le président a testé auprès d'interlocuteurs les noms de (Xavier) Bertrand, (Jean-Louis) Borloo, (Michel) Barnier et (Bernard) Cazeneuve", affirme un cadre du camp présidentiel. Les trois premiers cités "travaillent à crédibiliser leur candidature", assure une autre source bien placée au sein du camp présidentiel.
Mais "le sujet, c'est pas de savoir qui entre Bertrand, Barnier, Borloo ou (Valérie) Pécresse le président va appeler", recadre un dirigeant de la droite. "Le vrai sujet est qu'avec l'Assemblée nationale élue par les Français, je ne vois pas bien ce qu'on peut faire. Et c'est avant tout le problème de Macron, vu que c'est lui qui nous a mis dans cette situation".
Tenu par sa décision de dissolution, le président doit composer pendant au moins un an avec cette Assemblée. Où tous les regards sont déjà braqués sur le budget qui doit, constitution oblige, impérativement être présenté début octobre au Parlement. Ce qui suppose une présentation préalable en Conseil des ministres fin septembre. Et donc un gouvernement.