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[Spécial sexe 2024] Niels Schneider : “J’avoue avoir parfois volé des vêtements pour les sentir”

De tous tes sens, lequel est le plus réactif aux stimuli érotiques ?

Ce n’est pas très original, un peu comme tout le monde : l’olfaction. C’est instantané, inconscient… C’est pour ça que les gens se parfument. L’odeur, c’est ce qui rend fou. Inversement, on peut cesser de désirer une fille très belle ou un garçon très beau si soudain son odeur nous indispose.

As-tu déjà reniflé le vêtement de quelqu’un en son absence ?

Oui, bien sûr. J’avoue avoir même volé parfois des vêtements pour les sentir.

Est-ce que tu fais souvent des rêves érotiques ?

Oui, par périodes. Plus souvent en été, j’ai l’impression… Mais je ne me souviens pas précisément de mes rêves.

Est-ce que les pensées érotiques occupent beaucoup de ton temps diurne ?

Quand j’étais adolescent, ça occupait la totalité de mon espace psychique. [rires] Vraiment, à chaque minute d’une journée, j’étais assailli par des images mentales érotiques, des idées sexuelles. Absolument tout était érotisé. Aujourd’hui heureusement, ça s’est pas mal calmé. Ça intervient quand je suis inoccupé, quand je ne suis pas avec la personne que j’aime. En son absence, je peux m’abandonner à des rêveries érotiques.

Est-ce que tu fétichises certaines parties du corps ?

Moins que d’autres personnes que je connais. Je connais des mecs qui disent des trucs du genre : “Si ces chevilles ne sont pas comme ça, c’est impossible pour moi.” Je n’ai pas ça du tout. J’ai davantage une vision d’ensemble des personnes. Mais je suis quand même sensible aux nuques, aux cous… J’aime bien les pieds aussi. Mais je ne fais pas de fixation non plus. D’ailleurs je n’ai pas vraiment de critères physiques dans mes désirs. Je n’ai pas de critères de poids, de taille, de couleur de cheveux, de tranche d’âge…

Quel serait alors pour toi le critère du sexy ?

Il faut que la personne ait quelque chose qui m’échappe. C’est ça qui peut me rendre amoureux. Le sentiment d’insaisissable. Et je n’associe pas ça aux clichés de la femme mystérieuse et fatale. Mais je peux être profondément ému par le sentiment que chez l’autre, quelque chose dépasse un peu ma compréhension, que je n’y ai pas tout à fait accès. Et puis aussi le sentiment d’indépendance. Pour moi, c’est indispensable pour que je puisse être vraiment attiré par quelqu’un. J’ai besoin de sentir sa liberté. Et sentir qu’il y a une promesse d’aventure.

As-tu eu des modèles en matière de sexiness masculine ?

Bob Dylan. Je le trouvais hyper-sexy. J’adorais son attitude, sa façon de dévoiler et cacher en même temps, ce sourire qui semble toujours dire “I know something that you don’t”. Il avait à la fois quelque chose de tourné vers l’extérieur et tourné vers l’intérieur, hyper-sexy. Et puis River Phoenix, à fond. Plus jeune, j’ai énormément admiré des acteurs morts jeunes : Patrick Dewaere, Guillaume Depardieu… Il y avait chez River quelque chose de presque trop beau pour durer. Ce côté ange foudroyé me bouleversait. Et puis une forme d’immortalité aussi. Sa disparition précoce a rendu sa jeunesse et sa beauté immortelles.

Te souviens-tu de ta première émotion érotique ?

Oui, je m’en souviens très bien. C’était une institutrice, qui avait une tête étrange, des traits un peu prognathes, presque un air de femme préhistorique. Elle m’obsédait complètement. Un peu plus tard, de façon beaucoup plus classique, il y a eu Alicia Silverstone, Neve Campbell… J’avais 10 ou 11 ans. Je me souviens des modems 56k. C’était le tout début d’internet, quand on recevait un coup de fil, ça déconnectait… Je téléchargeais des photos d’elles que j’imprimais, ça prenait des plombes. Ma grande angoisse était que le téléphone sonne, que ça stoppe l’imprimante et que mes parents voient le truc. [rires]

La plus belle scène érotique au cinéma ?

Dans Ne vous retournez pas [Nicolas Roeg, 1973], il y a une scène de sexe entre le couple au centre du film montée avec le moment où ils se rhabillent. C’est très beau, on sent la gêne, la petite mort juste après. Je me souviens aussi avoir trouvé Sexe, mensonges et vidéo de Steven Soderbergh [1989] très érotique. Andie MacDowell et James Spader sont hyper-sexys. Quelque chose ne peut pas être consommé, on n’est que dans le fantasme… La déclaration d’amour de River Phoenix à Keanu Reeves dans My Own Private Idaho [Gus Van Sant, 1991] est une scène magnifique aussi.

Penses-tu que l’intensité du plaisir sexuel est liée à l’intensité des sentiments, ou que ça peut être totalement décorrélé ?

Je pense bien sûr qu’on peut jouir intensément avec quelqu’un pour qui on n’a pas de sentiment. Mais quand on fait l’amour avec un sentiment amoureux très fort, on peut atteindre une zone quasi mystique difficilement atteignable sans. Le sentiment de se laisser engloutir par l’autre, de perdre pendant un moment son individualité. Ça peut faire peur, et en même temps ça touche à une forme d’extase.

T’es-tu déjà dit que la vie serait moins épuisante sans désir ?

Bien sûr. Dans des moments de souffrance. On pourrait payer très cher pour se débarrasser d’un désir qui rend fou parce qu’il ne peut pas être satisfait. Mais en même temps, la vie n’est faite que de désirs. Donc il faut apprendre à les agencer, à les sublimer quand ils ne sont pas satisfaits, à les maîtriser…

Dans Les Amours imaginaires [Xavier Dolan, 2010], tu jouais un personnage au centre de tous les désirs, mais dont on ne savait pas trop ce qu’il désirait lui-même, sinon être désiré. Pour toi, ça a été plus structurant de désirer ou d’être désiré ?

De désirer bien sûr. Être désiré, c’est loin d’être structurant. Je me sentais très loin de mon personnage des Amours imaginaires. C’est le personnage le plus triste du film. Xavier s’était beaucoup inspiré des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes et avait réparti ses personnages en sujets ou objets. Le mien était un pur objet. Heureusement, dans la vie, on est généralement les deux à la fois, par alternance.

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