À la découverte de l'histoire et de la vie d'une espèce unique au Conservatoire national du saumon sauvage à Chanteuges
Le saumon et la Haute-Loire, c’est une grande histoire d’amour. Pierre Ribeyre, animateur au Conservatoire national du saumon sauvage, conte cette romance. Ce jeudi 25 juillet, plus d’une vingtaine de personnes patientent dans le hall pour savourer cette histoire.
Le saumon, comment ça marche ?Enfants et adultes, au travers des vitres, tentent de repérer des saumons dans les dizaines de bassins plongés dans le noir. Une pièce aussi surprenante que l’entrée en scène de Pierre Ribeyre.
Pas de présentation, le guide réunit directement tout le monde autour d’une carte de la France. "Posez un petit caillou sur la ville dans laquelle vous étiez quand vous aviez un an", lance-t-il avant de placer la sienne à Issoire. Les visiteurs sont originaires du Chili, de la région lyonnaise, de Clermont-Ferrand, de Saint-Nazaire. Toutes ces réponses sont l’occasion pour Pierre Ribeyre de faire référence au sujet de leur venue. "Saint-Nazaire ! Vous avez remonté la Loire et l’Allier comme un saumon."
Le plus dur, c’est d’expliquer qu’il n’y a du saumon nulle part dans nos cours d’eau alors qu’on peut en acheter partout.
Pas plus d’explications sur la raison de cet exercice, il invite les participants à le suivre dans une salle. "Ne ferme pas la porte, ça me donne l’impression que je suis un prof." En effet, les 30 minutes suivantes ressemblent à tout sauf à un cours. Après un briefing historique et géographique, Pierre Ribeyre longe les murs, auxquels sont accrochés des schémas du cycle de vie d’un saumon, puis saisit des cartes sur sa disparition progressive des rivières françaises.
Les saumons continuent de disparaître des rivièresLe guide énonce la date clé : 1995. Cette année-là, 235 saumons avaient passé le bassin-versant de Vichy. Le seuil de non-régénération de l’espèce est donc atteint. Il est décidé que la pêche du saumon sera désormais interdite. "Des générations ont vu arriver du saumon fumé dans les magasins. On l’achetait au même prix que du jambon d’Espagne et ça a créé une perte des consciences collectives." Pierre Ribeyre confie que "le plus dur, c’est d’expliquer qu’il n’y a du saumon nulle part dans les cours d’eau alors qu’on peut en acheter partout. Le volet sensibilisation est donc très important pour remettre le saumon dans les consciences collectives. Après, il faut que ça reste léger et touristique."
Le rôle du Conservatoire, c’est de capturer, soigner et nourrir des saumons pour récupérer des œufs et les vendre dans des zones sur lesquelles le saumon a disparu afin de relancer l’espèce.
Le guide a ses anecdotes (voir ci-dessous), ses phrases toutes travaillées pour accrocher le public comme "tout l’été, ils regardent passer les canoës au frais sous une pierre", "il boit sa compote", "ils vivent leur crise d’adolescence". Il en a aussi pour alarmer comme "si l’eau dépasse 26°C, comme lors des dernières canicules, tous les saumons meurent".
Après l’explication biologique, Pierre Ribeyre invite les participants à le suivre à l’extérieur et à proximité de la confluence de la Desges et de l’Allier. C’est le moment de développer la mission du CNSS. "On les détourne pour que les saumons aient l’impression de migrer dans les bassins. Le rôle du Conservatoire, c’est de capturer, soigner et nourrir des saumons pour récupérer des œufs et les vendre dans des zones où le saumon a disparu afin de relancer l’espèce comme en Allemagne, en Belgique ou dans le Rhin."
Le CNSS se retrouve obligé de vendre aux restaurantsLa visite s’enchaîne ensuite au niveau des bassins. Derrière les vitres, ils peuvent observer un saumon capturé (comme sur l’illustration). Les participants ont aussi pu voir comment le Conservatoire agit pour remettre ces alevins dans la nature. Pierre Ribeyre finit par les inviter à retourner dans la première salle après avoir fait le tour complet.
Les questions fusent jusqu’à l’encaissement des visiteurs. "Plus, tu donnes des réponses, plus les gens posent des questions, c’est super intéressant, se satisfait le médiateur. On voit que le saumon reste un ambassadeur puissant. Il y a de plus en plus de gens qui viennent alors qu’il y a de moins en moins de saumons !" Le CNSS demande un retour du soutien financier de la part des autorités publiques. "Ces visites apportent une aide. On est aussi obligé de vendre quelques saumons à des restaurateurs pour pouvoir financer cette structure qui est LA référence pour la sauvegarde de cette espèce."
De son côté, Pierre Ribeyre cherche à créer de l’émerveillement pour amener au respect et à rendre curieux les visiteurs pour leur délivrer la connaissance. "Ils auront des choses à dire au prochain Noël devant leur saumon fumé", promet-il.
Réservation : 06.63.49.59.55. Tarif : 7 €. Site internet : www.saumon-sauvage.org.
Félix Mouraille