A69: un dernier bastion d'"écureuils" sur le chemin de la future autoroute
"Il n'y a plus aucun arbre sur le tracé, à part à Verfeil", a déclaré vendredi à l'AFP Martial Gerlinger, directeur d'Atosca, concessionnaire de l'A69.
Un dernier opposant campant dans un arbre à Saïx, dans le Tarn, a dû le quitter en début de semaine, après une nouvelle intervention des gendarmes, et la dernière Zone à défendre (ZAD) tarnaise sur le tracé a donc été rasée.
Sur le terrain de Verfeil, à quelque 25 km de Toulouse, une quinzaine de zadistes déjeunent autour d'une table ou s'affairent pour préparer la suite.
Trois jeunes, certains d'entre eux cagoulés, clouent des planches en bois pour faire une cabane qui restera au sol.
Trois autres, marteau en main, en fabriquent une plus petite, destinée à être remontée à l'aide de poulies en haut d'un des grands arbres devant être abattus.
"Nous sommes déterminés" à tenir, souligne un autre zadiste d'une trentaine d'années qui souhaite aussi rester anonyme.
Tentatives d'incendie
Des cabanes comparables sont déjà installées en haut de certains grands arbres de ce terrain de 8.000 m2 qui en compte une vingtaine et entoure une maison où réside Alexandra, 44 ans, qui elle non plus ne souhaite pas donner son nom.
Cette locataire de l'ancien propriétaire - "qui m'a vendue avec la maison", regrette-t-elle - aurait voulu "tenir" elle-aussi face à l'avancée du chantier qui, pour l'instant, s'arrête net à quelques mètres de son terrain.
Mais elle a fini par accepter de conclure un accord de relogement avec Atosca et compte quitter les lieux lundi, n'y laissant que les "écureuils": "Après deux incendies, des coupures d'eau et de courant, j'ai dit +non, c'est bon+. J'ai un petit de quatre ans. Il n'a pas l'âge de mourir".
Le parquet de Toulouse a notamment ouvert deux enquêtes pour "dégradation par incendie" sur ce terrain les 26 août et 1er septembre.
Ce jour-là, avait constaté un journaliste de l'AFP, des traces de feu étaient visibles sur le siège de la voiture d'Alexandra, garée dans le jardin près de la maison, ainsi qu'à l'entrée du terrain, où la boîte aux lettres avait notamment brûlé.
Le parquet de Castres mène par ailleurs une enquête pour "dégradation par incendie" et "violences en réunion" dans un autre campement d'opposants, situé dans le Tarn, mais pas sur le tracé de l'A69.
"Fonctionnement plus normal"
De son côté, Atosca a porté plainte plus de 150 fois pour des dégradations sur le chantier qui s'étend sur des dizaines de kilomètres, mobilise 1.200 personnes et 300 machines de terrassement "qui travaillent tous les jours", selon le concessionnaire.
"On a encore ponctuellement quelques dégradations (...) et il y a eu aussi quelques jets de pierres sur nos personnels il y a quelques jours", précise M. Gerlinger, tout en espérant que "maintenant que les pages se tournent, on puisse revenir à un fonctionnement plus normal".
Outre la présidente PS de la région Occitanie, Carole Delga, de nombreux élus tarnais sont favorables à l'A69.
En revanche, des collectifs et mouvements écologistes dénoncent la destruction de zones humides, terres agricoles, arbres, écosystèmes et nappes phréatiques, et soulignent que l'actuelle route nationale est loin d'être saturée.
Atosca, qui évalue la surface déboisée pour construire l'autoroute à 13 hectares, met notamment en avant les 71 hectares de "compensation de zones forestières" prévues, comprenant des replantations le long du tracé.
Depuis plusieurs mois, la construction de cette portion d'autoroute de 53 km qui réduirait d'une vingtaine de minutes le trajet Castres-Toulouse, fait l'objet d'une vive contestation avec d'importants rassemblements où les opposants se heurtent aux forces de l'ordre.
Dès lundi, un nouveau bras de fer pourrait commencer entre Atosca, soutenu par les forces de l'ordre, et les zadistes.