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Pourquoi l'aéroport de Brive a choisi Chalair plutôt que Volotea ou Amélia pour les vols vers Paris ?

C’est fait. Après plusieurs mois de procédures et de négociations, l’aéroport de Brive-Vallée de la Dordogne (Corrèze) a enfin finalisé sa nouvelle OSP (obligation de service public) pour la liaison quotidienne avec Paris-Orly. Et c’est la compagnie Chalair qui a décroché ce nouveau contrat qui prendra effet le 27 octobre pour quatre ans. Sans trop de surprises.

1. Pourquoi cette nouvelle OSP ?

En théorie, après avoir signé avec la compagnie Amélia, en 2022, le comité syndical qui gère l’aéroport n’aurait pas dû avoir à se pencher sur une nouvelle OSP avant 2026. Mais c’était compter sans la décision de l’opérateur de dénoncer ce contrat, en février dernier. Comme il l’a fait également pour le Rodez-Paris, notamment.

En cause, des compensations financières jugées insuffisantes au vu entre autres de la hausse du kérosène. Car pour ces lignes dites « d’aménagement du territoire », l’État et les collectivités mettent la main à la poche pour compenser le déficit d’exploitation des vols.

Résultat, des passagers du Brive-Paris s’étaient retrouvés le bec dans l’eau entre le 2 et le 16 septembre, date à laquelle Chalair a repris la ligne de manière transitoire, dans le cadre d’un appel d’offres spécifique. Il y a donc une forme de logique à ce que cet intérim ait été prolongé.

2. Y avait-il d’autres candidats ?

Oui. Outre Chalair, qui a déjà les OSP des liaisons Castres-Paris, Aurillac-Paris et Limoges-Lyon, deux autres candidats s’étaient positionnés sur les vols vers Orly. Tout d’abord, Amélia, avec une offre revue à la hausse, mais également Volotea.

« C’est une compagnie low cost qu’on n’avait pas l’habitude de voir sur des OSP, mais qui arrive avec une renommée forte puisque le marché français représente 60 % de son activité », a indiqué Jérôme Courtois, du cabinet Iénair, qui a accompagné l’aéroport dans les négociations. Entretemps, le 19 août, elle a d’ailleurs décroché l’OSP pour le Rodez-Paris.

3. Qu’est-ce qui distinguait les candidats ?

Sur l’organisation des vols et sur leurs horaires, pas de grosses différences, malgré un temps de vol plus long d’un quart d’heure pour Chalair avec ses ATR à hélices.

Sur la capacité des avions, c’est l’approche de Volotea qui était la plus attractive avec un lancement à 90 sièges puis une bascule, au bout de onze mois, sur des A319 de 156 sièges. De son côté, Amélia proposait une « offre classique » avec un Embraer 145 de 49 places. Quant à Chalair, elle a proposé une offre autour de ses ATR 72 et 42 (de 70 et 48 places), avec « l’engagement fort » de basculer sur un ATR 72 biplace qui permettra « d’avoir un appareil de 50 sièges dont une dizaine en approche business ».

« En approche qualitative, l’offre de Volotea était la plus intéressante, mais ça ne veut pas dire qu’elle était la plus adaptée », a souligné Julien Bounie, le président du comité syndical. En parallèle, la compagnie annonçait des prévisions de 90.000 passagers dès la première année et même de 150.000 en 2028. Très loin des 27.000 voyageurs actuels, sur lesquels Amélia et Chalair ont basé leurs projections.

« Le risque de cette hypothèse trop élevée, c’était d’avoir une nouvelle cassure en cours d’OSP », a précisé Julien Bounie. En face, l’offre de Chalair est apparu plus « raisonnable et cohérente ».

Côté prix, enfin, Volotea arrivait, évidemment, avec la grille tarifaire la plus « offensive et des prix d’appel autour de 40 euros l’aller simple », dixit Jérôme Courtois. Celle de Chalair, n’en a pas moins été jugée « satisfaisante », notamment du fait de promos de lancement avec des billets autour de 60 euros l’aller simple.

4. Qu’est-ce qui a fait pencher la balance ?

L’argent ! En clair, les compensations demandées par les candidats pour les quatre ans de l’OSP. Alors que Volotea a présenté une offre globale à 28,7 millions d’euros et Amélia à 25,7 millions d’euros, Chalair a emporté le morceau en demandant un niveau de compensation à hauteur de 19,8 millions.

« Au final, Amélia était 30 % plus cher et Volotea 45 % plus cher, sachant que le prix a tout de même beaucoup augmenté puisque notre précédente OSP était de 15,8 millions d’euros », a détaillé Julien Bounie.

Sur les bases actuelles des aides de l’État, le syndicat table sur un reste à charge de 12,6 millions sur quatre ans. Un montant qu’il compte notamment financer grâce à son projet de centrale photovoltaïque au sol, et « sans augmenter la participation des collectivités », assure Julien Bounie.

5. De nouvelles turbulences sont-elles possibles ?

Dans le contexte actuel, notamment du fait de la situation budgétaire, Julien Bounie n’a pas caché qu’il était content de signer cette nouvelle OSP avant le projet de loi de finances (PLF) 2025, « parce qu’on a des certitudes sur des crédits qui sont bloqués ». Mais de manière plus générale, l’aéroport n’a aucune certitude sur le fait que Chalair ne dénoncera pas ce contrat avant son terme, comme Amélia, en février dernier.

En revanche, le comité syndical s’est mis à l’abri du cas de figure où il devrait relancer un appel d’offres en urgence en portant le délai de préavis de six à huit mois, soit le temps qu’il faut pour aboutir à une nouvelle OSP. « Ce qui fait qu’en contrepartie, nous aussi, on peut dénoncer l’OSP, si on n’est pas satisfait, a glissé Julien Bounie. Donc si on voit que ça dévie, on pourra agiter le chiffon rouge. »

Michaël Nicolas

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