"Pour moi, la confiance est rentable" : Julia de Funès passe le management au crible
« Je dis ce que je pense sur le monde de l’entreprise et sur l’évolution du travail » : la philosophe et conférencière Julia de Funès ne mâche pas ses mots. Et c’est rafraîchissant.
Ce jeudi 17 octobre à Brive, elle donne une conférence dans le cadre de la grande Soirée de l'économie et des trophées des entreprises. La soirée affiche déjà complet, mais il sera possible de suivre son intervention à distance, en s'inscrivant en suivant ce lien.
À vous lire, à vous écouter, on se dit que la philosophie, ça fait souvent peur mais qu’en réalité, ça ne fait pas mal.
C’est une façon apaisée de se pencher sur une problématique. C’est souvent ce qui revient de mes conférences, en effet. C’est ce qui se produit quand on délivre de la philosophie sans la trahir, sans simplifier à outrance mais en la rendant accessible. Ce que je propose, c’est une philosophie très concrète, très appliquée, qui ne jargonne pas, qui n’est pas prétentieuse. L’ambition première de la philosophie, c’est de parler aux gens, c’est populaire dans le sens noble du terme.
Vous allez vous exprimer jeudi devant un parterre de chefs d’entreprise. Qu’est-ce que ça change ?
Cela ne change rien ! Devant des chefs d’entreprise, des salariés, des cols blancs ou des cols-bleus, j’ai un discours accessible. Je dis ce que je pense sur le monde de l’entreprise et sur l’évolution du travail.
Admiration et estime pour les chefs d'entrepriseLa façon dont la figure du chef d’entreprise est perçue a changé ces dernières années…
J’ai toujours beaucoup d’estime et d’admiration pour les chefs d’entreprise. C’était une fonction peut-être plus prestigieuse, avant… Mais je les regarde avec beaucoup d’admiration et d’estime, c’est très difficile d’être chef d’entreprise ou manager. En réalité, j’ai encore plus d’admiration pour les chefs d’entreprise qu’il y a quinze ans, je trouve que le contexte s’est énormément durci, c’est un métier plus difficile à exercer.
En Corrèze, l’une des problématiques qui touche toutes les entreprises, c’est la difficulté à recruter.
C’est structurel, ça concerne tout le monde. Les crises successives l’expliquent en partie, mais aussi le changement de sens du travail, le marché du travail qui favorise le turn-over… Ce que je vais essayer d’expliquer jeudi, ce sont les raisons de fond de cette problématique et comment y pallier.
Climat infantileDans votre livre, La vertu dangereuse, qui sort ce mercredi 16 octobre, vous parlez de ce climat “rose bonbon”…
Ce que je veux, c’est parler aux gens et pour cela il faut des termes clairs, parfois un peu rugueux, mais qui parlent à tout le monde…Sur le fond, il y a une sorte de pensée positive, il faut du fun, du cool, tout un climat infantile… C’est une bonne chose sur certains points, mais il y a aussi beaucoup de choses qui sont factices.
Il n’y a jamais eu autant de mal-être dans les organisations alors qu’on ne s’est jamais autant préoccupé de ce sujet : ça veut bien dire qu’il y a une erreur d’aiguillage quelque part.
On est pétri de bonnes intentions, on veut bien faire mais parfois le pire advient : c’est ce que je veux dire avec La vertu dangereuse…
Dans cet ouvrage, justement, vous assurez la chose suivante : la confiance est rentable. Vous conseilleriez aux chefs d’entreprise d’investir dans la confiance ?
Pas uniquement, bien sûr, c’est un investissement parmi de nombreux autres. Mais oui, pour moi, la confiance est rentable, dans les relations humaines en général et dans les relations professionnelles en particulier. Quand on vous a fait confiance, vous avez eu envie de vous montrer à la hauteur. La confiance, ça grandit, ça améliore les humains. Je donne souvent cet exemple d’entreprises qui ne limitent plus le nombre de congés payés, et en réalité les gens en prennent moins ! La confiance améliore tout le monde. Attention, je ne dis pas qu’il faut faire confiance à tout le monde. Mais quand on fait confiance à quelqu’un qui en est digne, en général, c’est très vertueux.
Propos recueillis par Pomme Labrousse