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En Corrèze, la ministre de l'Éducation fait le service après-vente des groupes de niveau

Ne dite pas groupes de niveau, mais groupes de besoins. C'était ce que les personnes les plus éloignées du monde de l'Éducation avaient retenu de la réforme portée par le gouvernement Attal, qui vise à regrouper les collégiens de sixième et de cinquième selon, justement, leurs "besoins", ou leur "niveau", en maths et en français.

Ce jeudi 17 octobre, la nouvelle ministre de l'Éducation, Anne Genetet, était en Corrèze pour en assurer le service après-vente. Ou, pour reprendre les éléments de langage du jour, pour récolter les "retours" et les impressions de la communauté éducative après la mise en place de ces groupes, à la rentrée.Photo Stéphanie Para

Retours largement positifs des profs...

La ministre a passé un bon moment dans deux salles de classe du collège Cabanis de Brive, face à des élèves de cinquième : un petit groupe de quinze collégiens identifié comme "à besoins" et un autre de 28 élèves situé à l'autre bout du spectre (baptisé "satisfaisant").

Les deux enseignantes qui ont participé à la rencontre y voient de nombreux avantages. "Être au fond de la classe, décrocher, c'est ça qui est stigmatisant", assure cette professeure de français qui avoue qu'avant la mise en place des groupes, elle n'avait pas mesuré l'étendue des besoins de certains élèves. "Je n'avais pas pris conscience à quel point ils étaient en difficulté et en souffrance. Aujourd'hui, je suis pleine d'espoir."

... et très enthousiastes des collégiens

Les parents n'avaient pas pu en profiter pour faire passer un message politique à leur progéniture, puisque les élèves n'ont été prévenus de la visite de la ministre que le matin-même. Dans le groupe en difficulté, les collégiens, un peu intimidés, ont expliqué qu'ils pouvaient aller "plus lentement"...

Les enfants du second groupe, très bavards, ont salué le fait qu'ils apprenaient "plus de choses", qu'ils pouvaient aller "plus vite". Ceci dit, l'un d'eux a fait la remarque suivante : "il y en a qui le prennent mal, de ne pas être dans le groupe des forts." Une camarade ajoute : "les éléments perturbateurs, ils sont partis..." Photo Stéphanie Para

Quant aux syndicats d'enseignants, ils ont, par la voix de la FSU de la Corrèze (et par le biais d'un communiqué, n'étant pas conviés à la visite) rappelé qu'ils étaient opposés à cette "vaste entreprise de tri social".

Quelques difficultés d'organisation identifiées

La mise en place des groupes, en revanche, soit, pour le collège Cabanis, cinq groupes à partir de quatre classes différentes (qui ne sont en groupe qu'en maths et français) n'a pas été une mince affaire. De 104  (pour les sixièmes) ou 112 élèves en cinquième, il a fallu faire cinq groupes, dont les plus faibles ne doivent pas réunir plus de quinze adolescents... Un vrai casse-tête ! Même si Laurent Dyon, le principal adjoint, précise que la répartition des élèves entre six professeurs différents (certains ont deux groupes) s'est faite dans le dialogue.

En revanche, une des deux enseignantes a expliqué à la ministre que ce mélange l'empêchait d'identifier à quelle classe appartenaient ses élèves : "je n'arrive pas à savoir qui est leur prof principal. Et moi, ça m'empêche d'être leur prof principale". Questionnée à ce sujet (certaines classes n'ont pas de professeur principal depuis la rentrée), Anne Genetet a botté en touche : "je doute que ça puisse mettre en péril" le fonctionnement de la classe, juge la ministre qui aimerait savoir "pourquoi on n'est pas parvenu, dans ces cas-là, à mettre un prof principal".

La question de l'estimation du niveau des connaissances

Autre difficulté pointée par les enseignantes : comment conduire un conseil de classe, ou même établir une moyenne de classe quand les enfants ont répondu à des évaluations différentes ? Bref, le 16/20 du groupe satisfaisant ne dit pas la même chose que le 16/20 du groupe des élèves les plus en difficulté... 

Ne serait-ce pas l'occasion de se débarrasser des notes ? Réponse d'Anne Genetet : "les élèves demandent des notes !" Reste à voir si la ministre tiendra aussi compte de leur souhait sur le sujet du téléphone portable au sein des établissements...

Pomme Labrousse

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