Reconnectée à ses "racines africaines", Lubiana chante sa "Terre rouge"
A l'approche de la sortie de "Terre rouge", vendredi, Lubiana s'affiche "sereine", prête à présenter ce deuxième opus, fruit des explorations et rencontres qui l'ont inspirée.
La pochette de ce disque aux sonorités africaines, accents soul et pop envoûtante est sortie des archives familiales: alors haute comme trois pommes, Lubiana se promène sur cette terre rougie par le fer, tout sourire en robe à volants, au milieu des cases de son village, Bangoua.
Cette localité se situe à environ 250 kilomètres au nord-ouest de la capitale Yaoundé, au pays des Bamilékés. Lubiana en a appris le dialecte, dans lequel elle chante, tout comme en bambara, français et anglais.
L'album renferme "mon retour à mes racines africaines, évidement plein de moments très précieux dans mon village, ma reconnexion à mes ancêtres, et puis toute la transmission que m'a apporté et que m'apporte encore mon grand-père", confie-t-elle à l'AFP.
"Grand-père"
Une chanson intime est dédiée à cet aïeul paternel de 93 ans, qui "peut parler des heures et des heures au coin du feu" et auquel elle promet de "porter loin" la "culture" et la "voix".
"Mon grand-père me dit toujours: +pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient+", confie sa petite-fille, qui s'est fait connaître adolescente en participant au télé-crochet musical The Voice Belgique, avant de faire les premières parties de Youssou N'Dour.
"C'est en grandissant que j'ai commencé à me rendre compte de ma différence parce qu'on me l'a fait ressentir", glisse Lubiana, 30 ans, qui consacre d'ailleurs un morceau au métissage. "Je suis la Blanche comme ils m'appellent, parfois la Noire comme ils aiment me le faire savoir", chante-t-elle dans "La Blanche".
"J'ai tellement cherché ma place, notamment en Afrique. Je peux aujourd'hui dire que je suis Africaine. Il y a deux, trois ans, je ne l'aurai jamais dit", affirme-t-elle désormais.
Après "une coupure" de dix ans avec ce continent, elle a enchaîné les expériences: en Gambie pendant le ramadan ou dans un monastère au Cameroun, elle s'adapte. "C'est ça qui est beau, ne pas vouloir imposer une vision ou une vérité, mais au contraire aller à la rencontre de l'autre", revendique l'artiste. Car "le point commun c'est toujours l'amour".
"Traditionnel", pas "démodé"
Ce parcours initiatique a pour boussole la kora.
Cet instrument à cordes, sorte de harpe emblématique de l'Afrique de l'Ouest et traditionnellement réservé aux hommes, lui est apparu en rêve et l'a choisie, résume-t-elle. Et les joueurs, appelés griot ou djeli, lui ont fait une place.
Elle a ainsi rencontré l'un des plus grands virtuoses de kora, le musicien malien Toumani Diabaté, avec qui elle signe un mélodieux morceau, qui résonne d'autant plus fort qu'il s'agit de l'une des dernières collaborations de l'artiste disparu en juillet dernier.
"Jouer un instrument traditionnel, c'est aussi dire qu'en fait il n'y a rien de démodé", glisse-t-elle, estimant que "l'aura bienveillante qui reste" du maître lui donne envie de continuer à se perfectionner.
Lubiana partage un autre duo - "Farafina Mousso", qui signifie "femmes d'Afrique" en bambara - avec le chanteur et écrivain franco-rwandais Gaël Faye, qui l'a conduite jusqu'au Rwanda chargé d'histoire mais aussi d'"espoir", relate-t-elle.
Cet album, co-réalisé avec le multi-instrumentiste Clément Ducol, compositeur de plusieurs musiques de films dont "Emilia Perez" de Jacques Audiard, a aussi la particularité d'avoir été enregistré en studio, en session live. L'artiste voulait éviter un rendu "lisse", préférant conserver les aspérités sonores qui le rendent "vivant, authentique, organique".