Aidé par l’Iran, le Hezbollah aurait cloné un missile israélien
Au Proche-Orient, le secteur de l’armement voit double. Le Hezbollah, groupe paramilitaire libanais en conflit avec Israël, aurait utilisé une copie d’un missile antichar appartenant à Tsahal, la force de défense israélienne. C’est en tout cas ce qu’affirment les renseignements de l’Etat hébreu. Pour comprendre comment cela est possible, il faut rembobiner presque vingt ans en arrière. Lors de la guerre contre Israël au Liban en 2006, les combattants de la milice chiite auraient saisi les premiers missiles antichars israéliens Spike, rapporte le New York Times.
Une fois dérobées, ces armes de pointes auraient été expédiées au principal bailleur de fonds du Hezbollah, l’Iran, qui se serait chargé du clonage en procédant à une ingénierie inversée. Une méthode qui consiste à démonter un système pour le comprendre et éventuellement le reproduire sans connaissance initiale de la manière dont il a été conçu.
Pour rappel, l’Iran finance et arme "le parti de Dieu" depuis des décennies, et le groupe s’est joint aux attaques contre Israël pour soutenir son allié à Gaza, le Hamas, peu après que celui-ci a mené une attaque en Israël le 7 octobre 2023. A noter que Téhéran a l’habitude de copier des systèmes d’armes conçus par ses adversaires, pour les retourner ensuite contre ces derniers. Un exemple parmi les plus marquants : les Gardiens de la Révolution avaient annoncé, en 2014, avoir recréé un drone-espion identique à celui qu’ils avaient capturé en 2011, et qui appartenait aux Américains.
Une quatrième génération d’Almas ?
Grâce à l’Iran, le Hezbollah joue ainsi à un jeu pervers, en tirant les missiles copiés sur les bases militaires de son ennemi. Comme un retour à l’envoyeur. Le Hezbollah lance ces missiles, rebaptisés "missiles Almas" ("diamant" en arabe), avec "suffisamment de précision et de puissance pour constituer un défi important pour les forces militaires israéliennes", explique le New York Times. D’une portée allant jusqu’à 16 kilomètres, l’Almas est équipé d’un détecteur thermique et peut engager ses cibles avec une trajectoire balistique. Concrètement, cela signifie que le missile peut frapper les chars par le haut, où ils sont le plus vulnérables, et non sur le côté. Ce type de missile avait déjà été utilisé dans l’armée iranienne. Il a été dévoilé pour la première fois en 2021, lors d’un exercice militaire.
Le New York Times précise que "l’Almas peut transporter deux types d’ogives : l’une explose en deux phases, facilitant la pénétration du blindage, l’autre explose en boule de feu." Il existe au moins trois variantes connues de missiles Almas, chacune améliorée par rapport à la précédente. En juin, l’Alma Research and Education Center, un centre de recherche israélien cité par le quotidien américain, a indiqué que le Hezbollah semblait utiliser une quatrième génération, plus récente, qui, entre autres améliorations, envoie des images plus claires de son vol à ses opérateurs.
Le Hezbollah pourrait fabriquer les Almas au Liban
Le missile Almas illustre bien les avancées techniques croissantes en Iran et marquées par une normalisation des pratiques de clonage. Au risque de modifier les rapports de force dans la région ? "Ce qui était autrefois une diffusion progressive d’anciennes générations de missiles s’est transformé en un déploiement rapide de technologies de pointe sur les champs de bataille actifs", souligne auprès du New York Times Mohammed Al-Basha, un analyste en armement au Moyen-Orient qui dirige une société de conseil en risques basée en Virginie. Mais afin de réduire sa dépendance aux chaînes d’approvisionnement iraniennes, le Hezbollah a désormais la capacité de fabriquer les Almas au Liban, toujours d’après les responsables israéliens de la défense.
Les capacités militaires du Hezbollah ne sont pas négligeables, puisque le groupe pro-iranien pourrait détenir entre 120 000 et 200 000 missiles, selon un rapport publié en mars 2024 du Centre d’études stratégiques et internationales. Des responsables américains et israéliens ont déclaré à CNN en juin dernier que le Hezbollah pourrait probablement pénétrer dans le système élaboré de défense aérienne israélien, appelé le Dôme de Fer, dans le nord du pays, notamment avec une attaque à grande échelle utilisant des missiles à guidage de précision. Par ailleurs, la CIA estime, selon nos confrères des Echos, les effectifs de "l’armée" du Hezbollah à 45 000 hommes dont 20 000 à plein temps.