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"Pacte républicain", démission d’Emmanuel Macron… A gauche, l’après-Barnier attise les tensions

Un vote à la quasi-unanimité. Sur les 192 députés membres des différents groupes du Nouveau Front populaire, 190 ont finalement fait le choix de censurer le gouvernement de Michel Barnier ce mercredi après-midi. Seuls la députée socialiste Sophie Pantel et l’élu indépendantiste calédonien Emmanuel Tjibaou n’auront finalement pas apporté leur voix à la motion de censure, réduisant à néant les maigres espoirs du bloc central de voir le Parti socialiste revenir sur sa décision de faire tomber l’exécutif. Mais cette unité d’un après-midi ne suffit pas à effacer les divergences qui s’épaississent entre les principales forces de gauche. A l’aube de l’après-Barnier, les tensions entre la France insoumise et le Parti socialiste semblent de plus en plus marquées.

Du côté des troupes de Jean-Luc Mélenchon, la ligne semble rester fixe : soit Emmanuel Macron nomme comme Première ministre Lucie Castets, la candidate désignée par le Nouveau Front populaire l’été dernier, soit les Insoumis s’opposeront en bloc au prochain locataire de Matignon. "Si Emmanuel Macron ne nomme pas un Premier ministre issu du NFP, on censurera automatiquement le gouvernement", a encore rappelé la présidente du groupe insoumis Mathilde Panot sur LCI ce jeudi matin.

La position n’a pas changé depuis celle affichée par Jean-Luc Mélenchon le soir du second tour des législatives : "rien que le programme, mais tout le programme", s’opposant ainsi à tout accord de principe avec le camp macroniste. Et si Emmanuel Macron refuse leurs revendications, il ne restera aux yeux des Insoumis qu’une seule option : la démission du président de la République et la tenue d’élections présidentielles anticipées, pour lesquelles LFI plaide sans sourciller. "La censure inéluctable a eu lieu. Même avec un Barnier tous les trois mois, Macron ne tiendra pas trois ans", a encore écrit Jean-Luc Mélenchon sur X ce mercredi soir.

Un revirement du côté du PS

Mais le soutien univoque à la candidature de Lucie Castets, et le souhait d’un gouvernement du NFP seul, semblent avoir fait long feu dans le reste de la gauche, et notamment du côté des socialistes. Si leur désaccord avec le gouvernement Barnier restait trop important pour ne pas voter la censure, ces derniers multiplient depuis quelques semaines les déclarations en faveur de la recherche d’un compromis avec le bloc central. Le patron des députés socialistes Boris Vallaud avait été l’un des premiers à aller dans ce sens il y a une dizaine de jours, en appelant à "poser la question des conditions d’une non-censure" à tous les partis hors-RN dans le cas d’un renversement du gouvernement Barnier.

Le patron du PS, Olivier Faure, a quant à lui tenté de clarifier la position de son camp, sans cesse appelé à la "responsabilité" par les macronistes. "Il faut un Premier ministre de gauche qui dirige un gouvernement de gauche ouvert au compromis", a-t-il expliqué ce mercredi soir, affirmant que cet exécutif se refuserait notamment à l’utilisation de l’article 49.3. Olivier Faure s’oppose également frontalement à l’appel à la démission d’Emmanuel Macron formulé par les Insoumis, avec qui celui-ci assure avoir une "divergence". "Je ne cherche pas à bloquer les institutions pour pousser le chef de l’Etat à sa démission. Il y a déjà eu la folie de la dissolution, on ne va pas continuer avec la folie de la destitution", répétait le chef des socialistes au micro de France Inter ce jeudi matin.

Un compromis, quel compromis ?

Insoumis contre socialistes : la petite musique semble de plus en plus insistante depuis les âpres négociations du Nouveau Front populaire en juin dernier, et même l’accord de la Nupes en 2022. Reste encore à clarifier les positions des autres forces de gauche également présentes à l’Assemblée. Du côté des écologistes, c’est davantage la perspective soutenue par le Parti socialiste qui semble faire son chemin. "A situation exceptionnelle, solution exceptionnelle", a affirmé ce mercredi la patronne des Verts Marine Tondelier, appelant à la recherche d’une solution "dans le cadre du front républicain", en s’adressant aux "centristes" et aux "macronistes". Le sénateur écologiste et ex-candidat à l’élection présidentiel Yannick Jadot a même poussé l’idée plus loin, appelant à un "compromis exceptionnel", avec un gouvernement dirigé par la gauche mais incluant "des ministres issus du bloc central" au nom d’un "pacte républicain transitoire". "C’est au bloc central de se décider, soit il confirme et formalise son alliance avec le RN, soit on travaille ensemble. Le groupe NFP est arrivé en tête, donc le président de la République doit enfin s’adresser à nous", a-t-il de nouveau plaidé ce jeudi matin.

Mais si des membres du bloc central comme Gabriel Attal plaident également pour trouver une forme d’accord avec les socialistes, la manière de le traduire semble aujourd’hui très loin d’être évidente. Le compromis, oui, mais derrière moi et mes idées : c’est ce qui ressort des déclarations de chacun, faisant de la concrétisation d’une forme d’accord quel qu’il soit une hypothèse bien lointaine. Et les noms cités jusqu’à présent pour remplacer Michel Barnier, de Sébastien Lecornu à François Baroin en passant par François Bayrou, ne semblent pas indiquer une volonté soutenue d’Emmanuel Macron de se tourner vers sa gauche pour trouver une majorité à l’Assemblée.

De quoi faire dire au camp insoumis que vouloir trouver un terrain d’entente avec le camp macroniste relève au mieux d’un fantasme irréalisable et d’une "chimère", selon Manuel Bompard, au pire d'"une rupture avec le Nouveau Front populaire", d’après Mathilde Panot. "Emmanuel Macron va-t-il nommer un Premier ministre prêt à abroger la réforme des retraites ? Non. Fin de l’histoire. Tout le reste est de la politique-fiction", résume un élu LFI auprès de l’AFP. "Si on veut avoir une chance qu’il y ait un gouvernement de gauche, il faut tous taper sur le même clou", résumait quant à lui le patron insoumis de la commission des Finances de l’Assemblée nationale Éric Coquerel, affirmant que "la seule chose qui peut nous unir, c’est de continuer à exiger un gouvernement qui porte le programme du Nouveau Front populaire". Pas sûr que cette unité survive à la crise politique.

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