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"Effrayant" : en Bosnie, un grand lac presque à sec après une année sans précipitations

La petite baie entre Konjic et Jablanica, dans le sud du pays, a vu le tourisme fleurir ces dernières années. Ses habitants proposent en été hébergement et balades en bateau sur un lac couleur émeraude.

Ses eaux font tourner la centrale hydroélectrique de Jablanica, à plusieurs kilomètres en aval. Chaque fin d'été, le niveau du lac artificiel commence à baisser, afin de pouvoir absorber les pluies automnales.

"L'ancienne ville d'Ostrozac a été submergée par le lac en 1953. Depuis, le niveau (du lac) varie un peu, ça descend et ça remonte. Mais ça (le manque d'eau, NDLR), je ne sais pas ce qui se passe", confie à l'AFP Saliha Kuljanin, 68 ans.

En donnant un coup de râteau au gazon qui a commencé à pousser en dessus de sa maison, elle assure que ce bout de terre est "recouvert d'eau en temps normal".
Pas de neige en hiver
Elle montre la plage à côté, au pied de la maison de son cousin, où ont été installés des tremplins, et la surface du lac désormais à plusieurs dizaines de mètres plus bas. Ainsi que des dizaines de bateaux échoués dans la vase, faute d'eau.

"Cette année, la sécheresse a vraiment été catastrophique. Le climat a changé certes, tout a changé. Mais ça alors! C'est effrayant", assure Mme Kuljanin, tout en s'interrogeant: et si les turbines de la centrale avaient peut-être tourné "un peu trop" cette année pour produire de l'électricité?

Plus en amont, le lac a disparu sur plusieurs kilomètres. Son fond boueux est traversé par la rivière Neretva qui descend des montagnes et alimente cette retenue d'eau, dont le volume est d'environ 300 millions de m3 en temps normal.

Contactée par l'AFP, l'entreprise publique d'électricité qui gère la centrale de Jablanica, "Elektoprivreda BiH", affirme que la seule cause de la raréfaction de l'eau dans le lac est le manque de précipitations.

"L'année 2024 a été exceptionnellement mauvaise pour le fonctionnement des centrales. Comme il n'y a pas eu de neige l'hiver dernier, l'afflux dans la retenue au printemps a été peut-être à son débit le plus bas depuis l'existence du lac", assure Fahrudin Tanovic, directeur exécutif de la compagnie chargé de la production.
Ralenti
Pour ne pas rater la saison touristique, la centrale a tourné au ralenti pendant un été "particulièrement sec aussi", ajoute-t-il.

"Nous sommes obligés de laisser passer par le barrage au minimum 40 m3 d'eau par seconde, alors que l'afflux variait entre 15 et 30 m3", précise M. Tanovic, en admettant que le niveau du lac est actuellement "environ 12 mètres en dessous du niveau (minimum) souhaitable".

Dans un récent rapport, l'Organisation météorologique mondiale (OMM), une agence de l'Onu, a mis en garde sur la multiplication des sécheresses intenses et des inondations extrêmes dans le monde, un "avant-goût" des évolutions à venir alors que le changement climatique rend le cycle de l'eau plus erratique.

L'OMM a ainsi signalé une aggravation à l'échelle planétaire de l'insuffisance des ressources en eau. Examinant les données sur 33 ans, l'organisation a constaté que les cours d'eau de la planète avaient atteint l'an dernier un niveau de sécheresse jamais vu sur cette période.

Pour M. Tanovic, ce qu'il se passe à Jablanica est "certainement (dû) au dérèglement climatique: nous avons de plus en plus souvent de grandes quantités de pluie en très peu de temps et sur une toute petite zone. Et ça ne remplit pas la retenue d'eau".

Les inondations causées début octobre par de fortes pluies ont fait 27 morts en Bosnie, la plupart justement dans cette zone, faisant des dégâts importants dans plusieurs villages.

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