Vendée Globe. Guirec Soudée : «J’ai pensé que l’aventure allait se terminer!»
Au cœur de l’océan Indien, le skipper Freelance.com, actuellement 30e, a dû batailler pour résister à une dépression particulièrement virulente. Victime d’une avarie sur sa voile d’avant, de problèmes sur ses systèmes de safran et sur ses hydrogénérateurs, il a dû s’employer pour réparer à proximité des Kerguelen, notamment en montant au mât à deux reprises. Des réparations périlleuses à cause du vent fort, des vagues conséquentes et même de la densité des algues sur son sillage. Fidèle à son tempérament, Guirec n’a rien lâché. Mais il reste vigilant : un fort coup de vent l’attend à nouveau ce dimanche.
Comment tu as vécu la succession d’événements ?
« C’était une sacrée mission ! J’ai entamé les réparations mais j’ai encore pas mal de trucs à finaliser. J’ai dû affronter une grosse dépression en milieu de semaine. Il y avait une vingtaine de nœuds et subitement, le vent est monté à 50 nœuds. À cet instant, je suis parti au lof et pendant 45 minutes, c’était impossible d’abattre. Mon J2 (voile d’avant) était délaminé, le mât tremblait dans tous les sens… Je pensais vraiment que j’allais démâter. Dès que le vent a baissé, je me suis activé à l’avant. Le bateau est parti en surf, j’étais sous l’eau, c’était l’enfer… À un moment, je ne savais plus quoi faire.
« À 20 minutes près, je m’échouais aux Kerguelen ! »
Tu as donc décidé de te dérouter vers les Kerguelen pour réparer ?
« Oui, je voulais me mettre à l’abri. En m’y approchant, j’ai été ralenti par beaucoup d’algues. Elles étaient tellement nombreuses que ça a endommagé mon système de safrans. Arrivé à la pointe Nord-Ouest de l’île, je n’avais qu’une vingtaine de nœuds de vent et je suis monté au mât. J’ai passé une heure sauf que le bateau est parti au lofe à nouveau et il se déroutait vers la côte. À 20 minutes près, je m’échouais aux Kerguelen ! La bonne nouvelle, c’est que j’ai réussi à déhooker ma voile d’avant et que j’ai pu reprendre ma route.
L’accalmie a pourtant été de courte durée…
« Oui parce que le bateau a été arrêté net. Je pensais à un choc avec un OFNI mais c’étaient les algues à nouveau qui bloquaient la quille. Après, je n’arrivais plus à faire tomber ma grand-voile donc je suis remonté au mât cette nuit pour changer tout le système de hook avant de continuer à progresser.
« Dans mon malheur, je m’en sors bien »
Dans tout ce que tu as vécu, tu as eu peur ?
« Oui bien sûr. J’ai vraiment pensé que j’avais perdu mon mât et que l’aventure allait s’arrêter au Kerguelen. Et puis je n’ai plus qu’un hydrogénérateur : s’il casse, je serai handicapé pour produire de l’énergie ! Quand je suis monté au mât, je me suis fait balader aussi et j’ai quelques hématomes un peu partout. Mais dans mon malheur, je m’en sors bien. J’ai appris que Bernard Stamm s’était échoué aux Kerguelen lors d’un précédent Vendée Globe… Du coup en m’approchant, je n’ai pas dormi parce que j’avais peur de m’échouer moi aussi ! La prochaine fois que je viendrais, ce ne sera pas à bord d’un bateau de course !
La suite s’annonce corsée avec à nouveau des conditions difficiles demain…
« Oui, il va falloir que je me repose bien. Demain, un front va me passer dessus et je ne peux pas l’éviter. Je devrais avoir 60 nœuds, des rafales à 70 nœuds, des creux de 8 à 9 mètres… Il va falloir être prudent et prendre le moins de risques possibles.
Est-ce qu’il y a de la satisfaction à l’idée d’avoir surmonté tous ces problèmes ?
« Oui, tu es forcément super content quand tu résous un problème puis un autre. Après, si je n’en affronte plus jusqu’à la fin, ça ne me dérangerait pas non plus ! »
Source CP