Des Pays de la Loire à l’Idaho, ces antidotes au fatalisme budgétaire et réglementaire
Remise en ordre des finances publiques, libéralisation de la vie des entreprises : voilà les deux axes du meilleur programme économique et social pour la France. Il existe une fenêtre de tir politique pour convaincre nos concitoyens que ce projet est le bon pour l’avenir de notre pays. Un nombre croissant de Français s’inquiète du dérapage hallucinant de nos finances publiques, et la plupart des dirigeants d’entreprise, des agriculteurs, des professions libérales et des fonctionnaires ne supportent plus d’essayer de faire leur métier au mieux en se battant chaque jour contre les absurdités pratiques issues de la folie normative française. Dans le même temps, Javier Milei en Argentine, et Donald Trump et Elon Musk aux Etats-Unis ont revalorisé politiquement la question de la simplification, avec un style au populisme certes contestable, mais à la pédagogie indubitablement efficace.
Une poule devant un couteau
Autant ces idées générales de réduction des déficits et de simplification deviennent, si ce n’est consensuelles, en tout cas assez largement partagées chez nous, autant la réflexion sur la méthode d’action est quasi nulle. Concernant les finances publiques, on a vu le gouvernement de Michel Barnier être incapable de baisser les dépenses autrement que par le coup de rabot, aussi paresseux que douloureux et inefficace. La droite n’est pas avare de discours sur la nécessité de maîtriser l’endettement public. Mais une fois l’un des siens au pouvoir, elle se retrouve comme une poule devant un couteau.
Un exemple récent et inspirant de réduction des dépenses publiques se situe pourtant à moins de 200 kilomètres de Paris, dans la région des Pays de la Loire. Sa présidente Christelle Morançais (Horizons) a présenté un budget 2025 qui prévoit 100 millions d’euros de baisses de dépenses de fonctionnement – l’investissement n’est pas concerné –, sur un budget de 1,4 milliard. Une réduction de 7 % , c’est énorme. La région va notamment rationaliser le fonctionnement de l’insertion professionnelle.
L’opposition de gauche est au bord de la crise cardiaque, sans qu’on sache si cette émotion est surjouée ou sincère. Christelle Morançais est notamment accusée de vouloir assassiner la culture puisqu’elle a décidé, de façon fort à propos, d’alléger l’enveloppe des subventions. Et oui, la gauche devrait comprendre qu’il doit pouvoir exister une grande culture française qui ne soit pas systématiquement perfusée par l’argent des contribuables. Sur cette question culturelle, l’exemple des Pays de la Loire devrait nourrir une réflexion plus large. Une culture moins dépendante des subventions ne serait-elle pas plus inventive, plus libre, voire mieux à même de répondre aux attentes d’un public exigeant ?
Chaque norme doit avoir une date limite
En matière de simplification, tournons notre regard vers des contrées plus lointaines et exotiques que les bords de Loire : le nord-ouest des Etats-Unis, dans l’Idaho, Etat frontalier du Canada, séparé du Pacifique par l’Oregon. A la fin de la décennie 2010, cet Etat est parvenu à réduire son code public de 40 %. Le gouverneur républicain Brad Little a mené à bien une réforme qui a supprimé ou simplifié près de 2 000 pages de réglementations, faisant de l’Idaho l’Etat avec le corpus administratif le plus léger du pays. Tout a été fait pour que l’inflation normative soit contrôlée, à l’aune de quatre principes : chaque norme dispose d’une date limite prévoyant son expiration, à moins qu’elle ne soit explicitement prolongée ; l’Etat fixe un plafond au volume annuel des nouvelles réglementations ; chaque réglementation doit faire l’objet d’une analyse coût-avantage ; et un bureau indépendant examine leur pertinence.
Cette réforme a produit des résultats mesurables : elle a permis à l’Idaho de réduire significativement les délais procéduraux pour les entreprises et de stimuler la création d’emplois dans des secteurs comme l’agriculture et les nouvelles technologies. Cet exemple montre qu’une simplification réglementaire radicale peut transformer concrètement l’économie et la vie quotidienne des citoyens.
Les partis politiques, qui sont aujourd’hui, au mieux des clubs d’élus, au pire des agences d’événementiel pour leurs dirigeants, doivent reprendre l’initiative sur le plan intellectuel. En s’inspirant des politiques menées dans nos territoires ou à l’étranger, ils sauraient enfin quoi faire, et comment le faire une fois au pouvoir.
Nicolas Bouzou, économiste et essayiste, est directeur du cabinet de conseil Astères