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Le boudin moyen-ageux (pour ceux qui n'aiment pas le boudin)

Le boudin moyen-ageux (pour ceux qui n'aiment pas le boudin) GASTRONOMIE - Quand j'étais gamin, j'aimais déjà le jambon, et j'ai toujours préféré une rondelle de saucisson à un carré de chocolat. Pourtant, dans le cochon, il y a une chose que je n'aimais pas, mais vraiment pas du tout, c'est le boudin, avec ce boyau visqueux et ses gros morceaux de gras.

La créativité est affaire d'associations d'idées, on la stimule par les voyages, par les rencontres, ... Pour ma part, je vis à quelques dizaines de kilomètres de mon lieu de naissance, la plupart de mes voyages se comptent en hectomètres et ne dépassent pas les limites du Domaine de Saint-Géry où je trouve une grande partie de mon inspiration. Et quand au cours de ces grands voyages, je croise une amanite solitaire comme avant-hier ou au printemps des reines des prés, j'ai envie de faire quelque chose avec, non pas de les sublimer elles le sont déjà (sublimes), mais juste de les accompagner jusqu'à mon assiette, et celle de mes hôtes car chaque assiette que je sers, j'ai envie de la manger, la gourmandise est mon principal moteur.

Revenons à nos cochons. Quelques années plus tard, quand j'ai tué mes premiers porcs, il a bien fallu faire quelque chose avec le sang, quelque chose que j'avais envie de manger.

Parce qu'il y a une chose qu'on a tendance à oublier, c'est que la créativité culinaire n'est pas née au 21e siècle. De tous temps, les cuisinières et cuisiniers du monde entier se sont creusés la tête pour se régaler avec les ingrédients qu'ils avaient à proximité tout en trouvant un moyen de conservation. Et le cuisinier, tel Pascal dans ses Pensées avec son infiniment grand et son infiniment petit, est pris entre l'immensité de l'inspiration qu'il peut trouver dans l'approfondissement de ce qui l'entoure au plus proche et l'immensité des influences qu'il peut ramener de voyages lointains et exotiques. Approfondir, approfondir, approfondir, ... 100 fois sur ton métier tu remettras l'ouvrage.

Et ce sang de cochon alors, qu'en faire d'appétissant ? Question lancinante.

A cette époque mes lectures m'avaient emmené vers la cuisine du moyen âge, cette cuisine où l'on usait (et peut-être abusait) de ces épices nouvelles, rares et hors de prix, gingembre, girofle, poivre,... Eh oui je n'ai pas découvert les épices en partant en Thaïlande, au Pérou ou au Japon, mais en lisant des livres de cuisine édités au XV° siècle, il y a près de 600 ans, comme Le Viandier de Taillevent, Le Ménagier de Paris, ...

Et ces épices d'une autre époque, dans le boudin ça donnerait quoi ?

Et aussi, dans ces temps, je gavais des canards, et Raymonde (mon aide canard de l'époque) saignait les premiers canards de la journée directement dans une assiette, un coup de gnole, un peu d'ail et de persil, au frigo et 4 heures plus tard le sang est coagulé, hop à la poêle, un aller-retour comme une grosse crêpe et c'était délicieux pour notre déjeuner. Ici on appelle ça la sanquette, et quiconque a goûté la sanquette une fois dans sa vie en a un souvenir impérissable.

Avec le sang du cochon on doit pouvoir faire un peu pareil, non ?

On l'a fait, c'était en 1990 et c'était bon ... puis on a arrêté parce qu'on n'avait plus de cochon (donc plus de sang) et puis, bien plus tard, un chef (Bernard Bach Le Puits Saint-Jacques** à Puylaurens) m'a demandé l'année dernière tel le Petit Prince : "fais-moi du boudin ... pour un prédessert". Tiens tiens, du boudin dans un prédessert ! Alors on a trouvé un éleveur qui récupère le sang de ses porcs noirs et on a repris les cahiers de recettes d'avant l'ordinateur et Bernard a fait son prédessert.

Entre temps, on a mis au point ici une brioche dans laquelle le beurre est remplacé par le saindoux, une brioche incroyable de légèreté et bien plus digeste que celle au beurre. Car la cuisine au beurre et à la crème qui a pris son essor dans l'après seconde guerre mondiale (période où manger gras signifiait manger bon après des années de vaches maigres) et qui domine toujours la cuisine gastronomique française voire mondiale n'est pas le reflet de la typologie de notre cuisine. Par exemple, ici en Quercy ou en Gascogne le beurre est absent de toutes les recettes traditionnelles, même dans les pâtisseries.

Et la brioche au saindoux, avec le boudin ça donnerait quoi ?

Pour fêter cette Fête de la Gastronomie 2015, ce dimanche 27 septembre, Daniel Baratier du restaurant Les Déserteurs Paris XIe (jeune chef passé par les tables étoilées de Londres à Bora Bora en passant par Québec, la Côte d'Azur et la Corse, et qui sait que le produit est plus fort que le cuisinier comme la nature est plus forte que l'homme), sera en immersion au Domaine de Saint-Géry. Tel les grands auteurs de théâtre classique, il jouera selon la règle des 3 unités, de temps : une nuit seulement, de lieu : au Domaine de Saint-Géry et d'action : la cuisine. Avec audace, il ira chercher quelques légumes au potager sauvage (tomates, courgettes, aubergines, oignons, ...), peut-être quelques fleurs (de fenouil, de tournesol, ...) ou feuilles (de figuier, de cassis,...), il trouvera aussi sur place quelques fruits d'automne, peut être un champignon et diverses bricoles.

A ce propos, pommes et boudin, ça fonctionne bien, c'est sûr.

La semaine précédente nous sacrifierons, comme presque chaque semaine, un porc noir gascon, un de ces cochons "préhistoriques" qui vivent heureux, dehors, dans les bois et les prairies et non pas dans une prison comme ces cochons modernes, roses, élevés en batterie. Ce cochon agroforestier, après avoir vécu une belle vraie vie de cochon, nourri d'herbe, de racines, de glands, de châtaignes et de céréales nous rendra ce que nous lui avons offert pendant 18 mois : une viande savoureuse, tendre et nourrissante pour le corps et l'esprit. Laissant librement parler son inspiration, nul doute que Daniel saura accompagner dignement, avec l'aide et la complicité de ma modeste personne, toutes ces merveilles de la nature vers votre assiette, ... tout simplement, avec respect en s'enrichissant l'un de l'autre.

Sur la dizaine de plats qu'il concoctera pour cette Nuit de Saint-Géry, je caresse l'espoir que Daniel me laissera vous en préparer un avec ce boudin d'inspiration moyenâgeuse pour personnes qui n'aiment pas le boudin (et pour celles qui aiment le boudin aussi d'ailleurs), accommodé d'un peu de cette brioche aérienne et d'un fruit d'automne, et peut être aussi d'un peu de ce lard aux aromates que j'aime tant.

Pour aller au fond des choses, Thierry Delabre, audacieux « Panadero Clandestino », vous fera fermenter, 100% sur levain indigène et TRÈS lentement, les farines de blé truffier du Domaine issues de la dernière récolte 2015, en version parcellaire et variétale. Une occasion unique de voyage dans le goût du pain.

Venez découvrir la magnifique programmation sur www.fete-gastronomie.fr!
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