«J’ai été nommé sur un coup de fil et j’ai été écarté sur un autre»
A l’occasion de tenue de l’université d’été du Mouvement populaire algérien, Amara Benyounès revient après un long silence sur son limogeage du ministère du Commerce.
Après un long silence depuis son limogeage, le 23 juillet dernier, de la tête du ministère du Commerce, le leader du Mouvement populaire algérien (MPA), Amara Benyounès, est réapparu publiquement pour la première fois, hier, dans la ville côtière de Tichy, à une vingtaine de kilomètres de Béjaïa, à l’occasion de la tenue de l’université d’été de sa formation. Le président du MPA s’est exprimé devant des militants de plusieurs wilayas, pendant plus d’une heure. Il est revenu sur son limogeage et sur le bilan de son passage au département du Commerce. «J’ai été nommé sur un coup de fil et j’ai été écarté sur un autre», a-t-il déclaré, cité par l’APS, sans exclure l’hypothèse d’une «influence négative» de certains lobbies qui gravitent autour du commerce extérieur pour expliquer son départ.
Mais avant, Benyounès, dont les principes ne semblent pas avoir été altérés par son éjection du ministère du Commerce, a réitéré le soutien indéfectible de sa formation à Abdelaziz Bouteflika : «Nous avions soutenu le président de la République, nous le soutenons et nous continuerons à le soutenir jusqu’à la fin de son mandat.» L’orateur a mis fin à la rumeur qui le dit en conflit avec le frère du Président, affirmant que celui-ci «ne s’est jamais immiscé dans les affaires du ministère du Commerce».
Poursuivant, Amara Benyounès a défendu l’adhésion de l’Algérie à l’OMC, avant de revenir sur l’avalanche de critiques qu’il a essuyées quand il voulait mettre de l’ordre dans le commerce de l’alcool : «Je ne suis ni mufti ni imam, mon seul souci était de faire respecter les lois de la République, mais pour ceux qui m’ont critiqué, il n’y a que l’intérêt personnel qui compte.» Et de souligner l’importance du marché de l’alcool en Algérie et le désordre qui y règne : «Le chiffre d’affaires du commerce et de l’industrie de l’alcool en Algérie est de 2 milliards de dollars.
Nous buvons 200 millions de litres annuellement, nous avons 65 usines, 1674 unités de production et 35 000 travailleurs dans ce domaine. En tant que ministre, j’ai voulu organiser ce marché qui est le plus important du Maghreb vu, et tout le monde le sait, tout ce qui se passe dans les bars clandestins. Il suffit de voir les rapports de la gendarmerie, c’est un marché que l’Etat doit organiser à tout prix.»
«Protéger l’économie nationale»
Affirmant qu’il avait travaillé conformément aux directives du président de la République, Benyounès, qui révèle que ses prédécesseurs avaient accordé plus de 1000 licences pour l’alcool, soutient qu’il a pris cette décision pour «protéger l’économie nationale». Le protectionnisme a visiblement opéré aussi concernant le marché automobile. «Notre pays est devenu une aire de stockage de véhicules avec plus de 130 000 unités invendues. S’agissant du ciment, nous produisons 18 millions de tonnes annuellement et nous en consommons 22 et, au lieu d’importer 5 millions de tonnes pour combler le déficit, on en importe 10 millions. Cela va à l’encontre de la production nationale», martèle Amara Benyounès.
A ce titre, l’orateur estime que «le commerce extérieur doit être monopolisé par les Algériens». Se demandant pourquoi des ressortissants de certains pays ont le droit de faire des affaires en Algérie alors que les Algériens n’ont pas le droit de créer de registre du commerce dans ces mêmes pays, Amara Benyounès avoue avoir «voulu exclure les étrangers de l’octroi des licences». Déclarant laisser au peuple le soin de commenter son bilan en tant que ministre, Amara Benyounès se félicite de ce qu’il a accompli, citant dans ce sens l’allègement du dossier de registre du commerce et l’informatisation de la procédure, ainsi que sa participation active au débat plaidant pour l’adhésion «impérative» de l’Algérie à l’Organisation mondiale du commerce OMC).
Par ailleurs, fidèle à sa ligne anti-islamiste, Amara Benyounès s’en est pris, sans le nommer, à Madani Mezrag, dont le projet de création d’un parti politique a créé une vive polémique dans le pays : «Ce n’est pas Amara Benyounès qui lui interdira de faire de la politique, comme il l’a déclaré à la presse, c’est plutôt le peuple algérien qui le fera.» Le secrétaire général du MPA a, en outre, annoncé la tenue du congrès de sa formation au premier semestre 2016, annonçant plusieurs meetings dès ce mois d’octobre.