Новости по-русски

Le Pen au Nord (et au Sud): le racolage national des peurs

Le Pen au Nord (et au Sud): le racolage national des peurs La période est grave. Les temps actuels, avec leurs vents mauvais, sont inquiétants. Mais le pire n'est heureusement pas certain, même si le pessimisme peut être une vertu : car mieux vaut souvent prévenir que guérir.

Les politologues s'accordent actuellement pour dire que les sondages sur les intentions de vote, photographies prises à un moment "t", vite (dé)passé, ne peuvent être que floues. Non pas que les sondages trompent quiconque. Cette accusation aussi répandue qu'infondée fait partie d'une vulgate complotiste aussi partagée aujourd'hui que le national-populisme à relents xénophobe : il a le vent en poupe, sur le thème "on nous trompe", "on nous manipule", "on ne nous dit pas tout"...

Non, les photographies sondagières n'ont rien de manipulatoires, elles sont simplement floues car les opinions sont en grand mouvement, elles évoluent très rapidement en cette période post-attentats, elles flottent, entrechoquées autant par les émotions que par la raison. En cette période hyper-sensible pour une opinion nationale choquée par la sauvagerie des attentats djihadistes, ce sont bien sûr les peurs qui ont tendance à entraîner les esprits. Ce sont des peurs, à la fois légitimes (quand il s'agit du terrorisme, de sa violence lâche et aveugle) et irrationnelles (non, les djihadistes ne sont pas partout, cachés dans les banlieues parisiennes ou les villages bretons). Ce sont des peurs, qui constituent, depuis toujours, le carburant électoral du FN, ces peurs qui ont été, de tous temps, le fonds de commerce des mouvements d'extrême droite, des années 30 à nos jours.

2015-12-04-1449238941-1638902-fnajoutehaineprobleme.jpg


Or, et c'est devenu très clair dans l'ombre du traumatisme national que la France a vécu depuis le 13 novembre, la firme FN, en clan familial bien organisé, au Nord comme au Sud, non seulement récupère les peurs mais les exploite sans la moindre retenue, il les utilise et s'en réjouit : les Le Pen de trois générations, cet extrémisme à visage féminin au Nord et au Sud, racole les peurs et démonstration factuelle en sera faite ici, car le parti lepéniste fait de ce racolage une stratégie politique dont le cynisme n'a d'égal que son efficacité (de court terme). Qui n'est pas sans faiblesse (sur le moyen et le long terme).

Les agissements du FN dés le 14 novembre...

Voyons précisément ce qui s'est produit au FN, le 14 novembre. Dans la nuit qui a suivi celle des attaques terroristes, que faisaient les cadres dirigeants et les militants du premier cercle FN ? Dés ce samedi, Marine Le Pen le signal à ses troupes, devant les micros qui lui étaient tendus : "Les Français ne sont pas en sécurité !" a-t-elle aussitôt martelé. Son premier propos n'était pas celui d'une responsable publique, ne parlons pas de responsable d'Etat, devant un tel événement. Car tout responsable digne de ce nom sait que le terrorisme, de tout temps et en tous lieux, se joue du risque zéro. Il est même la preuve meurtrière, malheureusement régulière dans le monde, y compris et même surtout dans le monde arabo-musulman, que le risque zéro attentat n'existe pas. Ni en démocratie, ni même en dictature ou en régime autoritaire et policier. Voyons l'Egypte des militaires, qui n'empêche pas le terrorisme djihadiste de frapper. Voyons les Etats très policiers, de l'Algérie ou du Maroc, qui n'ont pas réussi à exclure tout risque d'attentats.

Le clan Le Pen, du Nord mariniste en tête, trompe donc les Français, en les caressant avec délectation dans le sens des peurs. Dés le 14 novembre, et c'est une grave dérive qu'il faut aujourd'hui souligner, alors que des dizaines de blessés du Bataclan souffraient très gravement dans les hôpitaux parisiens, la Présidente du FN, que d'aucuns ont contribué à banaliser ces dernières années, a montré son vrai visage : celui d'une racoleuse des peurs.

Comme des vautours, les dirigeants et militants endoctrinés de l'extrême droite, formés à "bonne école" dans le cas de la fille Le Pen, exploitent tous les problèmes visibles, ils sont les premiers à planer au-dessus des cadavres. Marine Le Pen a été à grande école, par son éducation familiale d'une cinquantaine d'années passée dans le sillage approuvé de son père, ex-parachutiste pendant la guerre d'Algérie, dont se méfiaient beaucoup d'officiers de l'Armée française pendant cette sombre période : à cause des méthodes et de la réputation sulfureuse que portait et colportait déjà le père de Marine Le Pen. Rappelons juste que Jean-Marie Le Pen était accusé d'avoir cautionné des tortures, pendant la guerre d'Algérie, il était de ceux qui considéraient, dans les repas de famille ensuite, puis les repas de campagnes dans les années 60 et 70, que pour obtenir des renseignements sur le terrorisme FLN, et bien toutes les méthodes pouvaient être bonnes ! Y compris les tortures de type "gégène" ou autres menaces de noyade, pour rechercher les poseurs de bombes.

C'est bien cette histoire là, que l'héritière du trône FN a cherché, ces trois dernières années, à effacer de son CV politique, s'appuyant sur l'ex-chevénementiste Floriant Philippot. Alors que ces trente dernières années, depuis l'âge de sa majorité et de sa maturité politique, Marine Le Pen s'est complètement mise dans la lignée extrême droitière du père, démontrant pendant cette trentaine d'années un militantisme sans relâche, qui ne rechignait sur rien, passant l'éponge sur le pire : tous les "dérapages" paternels qui, il y a 20 ans, faisait pourtant déjà dire à la droite de la droite qu'il ne fallait pas "diaboliser» le parti d'extrême droite, que cela n'était pas efficace...

L'exploitation de boucs-émissaires et des peurs, on y revient toujours, avec le FN. Le 14 novembre, avez-vous vu les dirigeants s'émouvoir, et chez les femmes Le Pen, pleurer les victimes ? Non, on les a vu faire immédiatement de la politique sur "l'insécurité des Français". Et, de mes propres yeux, j'ai vu, le dimanche 15 novembre, sur des kilomètres de murs d'autoroutes du Nord et d'Ile-de-France, des affiches FN très fraichement collées, dans la nuit du 14 au 15 novembre (la colle était encore palpable), ces fameuses affiches où l'on voit une jolie jeune fille, une mannequin de publicité, poser avec les couleurs du drapeau sur la joue, et à côté d'elle une effrayante femme en burqa (dont on a su qu'il s'agissait de la même mannequin !). Avec le slogan racoleur des peurs : "choisissez votre quartier !"

Débordement anti-national au FN, peu visible télévisuellement...

Inquiétant cynisme, quand on sait aussi que le leader francilien du FN, qui progresse dans les intentions de vote ces 15 derniers jours, est celui qui a été l'avocat personnel de Jean-Marie Le Pen, avocat qui a défendu toutes les couleuvres lepénistes appelées "dérapages", qu'il s'agisse de "calembour" odieux "Durafour crématoire" ou de la Shoah, qualifiée de "point de détail de la Deuxième Guerre Mondiale"... qualification heureusement condamnée par les tribunaux de la République française.

On a donc pu constater que quand le sang coulait encore au Bataclan, le FN trompait toute idée d'unité nationale et de recueillement, naturellement due aux victimes et à leurs familles. On se demande comment ces leaders d'extrême droite peuvent encore oser se dire "patriotes", dans ce contexte où ils ont montré un débordement de cynisme anti-national ?! Un tel débordement devrait leur valoir une honte nationale, plutôt qu'une récompense électorale... mais rien n'est moins sûr.

Car ce cynisme est naturellement beaucoup moins visible, médiatiquement, que les postures télévisuelles et les raccourcis sémantiques, qui font mouche, dans une partie de l'opinion, légitimement affolée par les circonstances du terrorisme et de l'état d'urgence. Les enquêtes télévisuelles, quasi-quotidiennes depuis trois semaines sur les sources du djihadisme armé, déversées en abondance lors des rendez-vous du "JT" de 20 heures en particulier, n'ont fait qu'alimenter, involontairement mais fortement, des inquiétudes devenues des peurs, qui peuvent tourner à la paranoïa nationale.

Dans ce contexte, le cynisme FN est aussi permanent qu'actif. Il est certifié aussi quand on sait que le mouvement d'extrême droite au Parlement n'a pas voté le renforcement des dernières lois anti-terroristes. Pas plus que le FN n'avait voté l'interdiction de la burqa, qui avait fait pourtant consensus républicain. C'est à souligner, aujourd'hui plus que jamais : comme une marque publicitaire creuse, le FN préfère, sur ces sujets d'intérêt national, se "démarquer", et continuer de dénoncer, de manière politicienne, "l'UMPS"... Pour tenter d'exploiter, sur tous les sujets, même les plus graves, le rejet des politiques.

En cela, la fille Marine Le Pen s'inscrit dans l'extrême droite ligne de Jean-Marie Le Pen, contrairement à ce qu'ont pu dire tous les dénonciateurs d'une soit-disant "diabiolisation" du FN, ces dénonciateurs qui se trouvent aujourd'hui pris au piège de la banalisation d'un parti national-populiste conquérant. Au point que ce parti est en situation de pouvoir emporter entre une et quatre grandes régions françaises. Il y a même une concurrence engagée vers la radicalité, au sein du FN, la petite-fille, Marion Maréchal-Le Pen faisant de la surenchère au Sud, sur le thème "identitaire" et racialiste.

Marine Le Pen "l'immigration bactérienne" et les pires amalgames

A Lille, Marine Le Pen veille à ne pas de laisser déborder par l'ambitieuse nièce, entourée d'intégristes catholiques et d' "identitaire" sans vergogne - l'une des figures de cette mouvance radicale, récemment condamnée pour incitation à la haine raciale, étant même montrée en exemple et placée sur la liste FN en PACA. La Présidente du FN, dans le Nord, ne veut pas, contrairement à sa nièce dans le Sud, supprimer les subventions du planning familial, mais elle fait de la surenchère sur les boucs-émissaires qu'elle a à sa portée : elle a récemment amplifié son discours sur "l'immigration-invasion", elle fait un amalgame grossier avec le djihadisme "qui pululle" dit-elle, dans nos quartiers, des mots qui traversent les époques de l'extrême droite. Mieux, elle a osé exploiter au maximum un problème sanitaire repéré dans le Calaisis. Des migrants y ont contracté des maladies, assez graves et rares ? Voilà la Président du FN, qu'on disait "banalisée", parler haut et fort, très publiquement, d' "immigration bactérienne" !

On voit bien qu'au FN le migrant n'est plus, depuis longtemps, une personne humaine mais l'instrument d'une stratégie politique : il s'agit d'exploiter un épouvantail populiste, une personne devenue bactérie, microbe... une dérive qui, en dehors du choc terroriste qu'a subi la France, aurait du faire scandale politique mais qui a permis au FN lepéniste du Nord-Picardie de tenter d'accroître son emprise mortifère.

Voilà l'un de ces odieux raccourcis qui font les grandes heures actuelles du national-populisme, qui cache à peine son extrême droite flamboyante. Marion Maréchal Le Pen, de son côté en PACA, bombarde son public grossissant d'injonctions péremptoires qui visent sans cesse la cible amalganée des "musulmans", priés de se conformer aux coutumes, vestimentaires notamment, qu'elle prétend être issues de "la chrétienté" ! Peu importe pour la jeune Marion Maréchal-Le Pen, présentée dans un euphémisme comme "traditionnaliste", ait sur son chemin de croix... le pape François qui rappelle, lui, les dangers des amalgames religieux et les vertus de la fraternité humaine et interreligieuse... : l'extrémisme français, à double visage féminin, avance de la sorte. Dans les deux cas, sur des registres et avec des mots différents, il organise le racolage des peurs et la promotion des pires amalgames.

En cela, et pour conclure, soulignons que le FN est l'allié objectif du djihadisme, dont il fait mine de s'opposer, alors qu'il ne fait que l'utiliser dans une propagande de délectation bien rodée. Se servir des peurs, une aubaine nationale pour lui : la ficelle est grossière, mais elle marche, dans une certaine mesure, dans une partie de l'opinion. Une partie de l'opinion qui sera précisément mesurée, non pas dans un sondage, mais dans les urnes, au premier tour des élections régionales. Un nouveau record électoral annoncé ?

Les urnes donneront un premier verdict. La mobilisation des électeurs, qui veulent faire barrage, sera aussi mesurable très précisément. Sachant que le second tour, le dimanche suivant, sera décisif et très mobilisateur. Des collectifs citoyens naissent. Commencera alors la bataille essentielle, celle qui clarifiera l'enjeu : mouvement FN, "identitaire", racialiste et xénophobe, exploiteur de toutes les peurs d'un côté ; "bloc républicain", s'il en est, pouvant affirmer (dans l'unité ?) que les piliers de la République, dont l'Egalité, la Fraternité et la Laïcité, ne peuvent pas être atteints comme cela. Même dans le contexte des émotions de la lutte contre le djihadisme, et surtout peut-être dans ce contexte, grave, de lutte contre le terrorisme. L'enjeu du 2ème tour sera, de ce point de vue républicain, finalement, assez clair. Les électeurs, si les politiques les y invitent avec clarté, seront amenés choisir en pleine responsabilité.

Lire aussi :

• Aux élections régionales, "voter FN, c'est"... tout et son contraire

• Jack Lang dénonce le "crétinisme et l'ignorance crasse" de Marion Maréchal-Le Pen

• La réponse (en smiley) de Marion Le Pen à ce faux tract

• Tous les matins, recevez gratuitement la newsletter du HuffPost

• Retrouvez-nous sur notre page Facebook


Читайте на 123ru.net