Alain Finkielkraut a craché au visage de la jeunesse française
Beaucoup a été déjà dit et écrit sur les insultes et les crachats subis par Alain Finkielkraut lorsqu'il s'est rendu Place de la République, le 16 avril, pour assister aux délibérations de la Nuit Debout. Pourtant, alors que l'essayiste réactionnaire essaye de relancer la polémique, ses propres crachats et insultes au visage de la jeunesse française ne sont toujours pas évoqués. Or, leur violence le mérite.
Voici en effet ce qu'il écrit sur la jeunesse française d'aujourd'hui, par exemple en page 133 de son dernier livre La Seule exactitude (Stock, 2015) :
Vous avez bien lu. Alain Finkielkraut a bel et bien écrit, noir sur blanc, ceci : face à l'horreur absolue de la Shoah, les chefs suprêmes du nazisme jugés à Nuremberg sont encore capables de compassion ; tandis que la jeunesse d'aujourd'hui, elle, est trop abrutie par les jeux vidéo pour en être capable. Ergo : pour lui, la jeunesse française d'aujourd'hui a moins de capacités à compatir et à s'émouvoir que des hauts dignitaires nazis.
L'on m'objectera peut-être que ce crachat d'Alain Finkielkraut au visage de la jeunesse - au sens métaphorique du mot ''crachat'' - ne peut en aucun cas être mis sur le même plan que les crachats physiquement subis par l'essayiste Place de la République. Je suis entièrement d'accord. J'affirme qu'au contraire, lorsqu'Alain Finkielkraut déclare notre jeunesse inférieure aux dignitaires nazis de Nuremberg en termes d'aptitude à la compassion, cela constitue une insulte, un crachat, infiniment plus graves que ceux qu'il a reçus physiquement. Et je mets au défi quiconque d'argumenter le contraire.
Dans ces conditions, lorsque l'essayiste juge sur tel plateau de télévision que ce qu'il a subi ferait de Nuit Debout "la réinvention du totalitarisme", l'on est donc fondé à lui objecter cette référence biblique célèbre : "Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil?".
Thomas Guénolé est politologue, auteur de Les jeunes de banlieue mangent-ils les enfants ? (Bord de l'Eau, 2016).
Voici en effet ce qu'il écrit sur la jeunesse française d'aujourd'hui, par exemple en page 133 de son dernier livre La Seule exactitude (Stock, 2015) :
"Lorsque à Nuremberg, on a projeté un film sur les camps de Buchenwald, Dachau et Bergen-Belsen, montrant les survivants faméliques et les montagnes de cadavres jetés par des pelleteuses dans des fosses communes, les dignitaires nazis eux-mêmes détournaient le regard, se cachaient le visage dans les mains, et certains d'entre eux se sont effondrés. Aujourd'hui, les jeux vidéo sont des écoles d'insensibilité, et le pathos pédagogique suscite au mieux des bâillements, au pire des railleries. Ce n'est donc pas avec une nouvelle injonction de devoir de mémoire qu'on guérira cette jeunesse narquoise de ce qu'elle vit déjà comme une overdose".
Vous avez bien lu. Alain Finkielkraut a bel et bien écrit, noir sur blanc, ceci : face à l'horreur absolue de la Shoah, les chefs suprêmes du nazisme jugés à Nuremberg sont encore capables de compassion ; tandis que la jeunesse d'aujourd'hui, elle, est trop abrutie par les jeux vidéo pour en être capable. Ergo : pour lui, la jeunesse française d'aujourd'hui a moins de capacités à compatir et à s'émouvoir que des hauts dignitaires nazis.
L'on m'objectera peut-être que ce crachat d'Alain Finkielkraut au visage de la jeunesse - au sens métaphorique du mot ''crachat'' - ne peut en aucun cas être mis sur le même plan que les crachats physiquement subis par l'essayiste Place de la République. Je suis entièrement d'accord. J'affirme qu'au contraire, lorsqu'Alain Finkielkraut déclare notre jeunesse inférieure aux dignitaires nazis de Nuremberg en termes d'aptitude à la compassion, cela constitue une insulte, un crachat, infiniment plus graves que ceux qu'il a reçus physiquement. Et je mets au défi quiconque d'argumenter le contraire.
Dans ces conditions, lorsque l'essayiste juge sur tel plateau de télévision que ce qu'il a subi ferait de Nuit Debout "la réinvention du totalitarisme", l'on est donc fondé à lui objecter cette référence biblique célèbre : "Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil?".
Thomas Guénolé est politologue, auteur de Les jeunes de banlieue mangent-ils les enfants ? (Bord de l'Eau, 2016).
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