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Face au terrorisme, la parole politique désemparée

Face au terrorisme, la parole politique désemparée Une parole politique qui a perdu ses repères

Les premières paroles politiques qui suivaient les attentats étaient celles de l'impuissance. Après les formules de deuil et de compassion, la classe politique nous a inondé de grandes déclarations d'intention. Nous n'accepterons pas la barbarie. Nous défendrons nos valeurs. C'est François Hollande qui répond à Donald Trump: "La France sera toujours la France. Elle porte toujours des (...) principes qui font que nous sommes reconnus dans le monde." Notre parole politique est pleine de mantras et de doudous rhétoriques. Désarmante, quand elle donne dans le fatalisme, sous couvert de réalisme. Manuel Valls répète que "nous allons vivre longtemps avec cette menace." Cette parole nous enterre.

Puis elle tombe volontiers dans le populisme. Chaque élu, chaque membre du Gouvernement veut entériner sa propre parole, si possible clivante, pour être repris dans les médias. Twitter a ajouté une dimension irréfléchie à la parole et à la récupération partisanes. Populisme sécuritaire d'abord, celui qui s'enracine assez naturellement dans la peur. Le fantasme de l'enfermement pour tous et de la surveillance généralisée quand Nicolas Sarkozy veut mettre tous les fichés S en résidence surveillée et Laurent Wauquiez propose des centres d'internement, c'est l'apologie des frontières et du repli. Ce populisme-là s'incruste directement dans les images sordides des chaînes d'information. Et puis, il y a une autre forme de populisme plus récent, de gauche, celui qui en appelle au politiquement correct, celui qui ne veut pas nommer l'islamisme pour ne pas avoir à toucher à l'islam.


"Le Président prend la parole avant d'avoir les éléments concrets de l'attaque du Bataclan, s'exprime au milieu de la nuit après Nice: finalement, c'est François Molins que les Français écoutent avec le plus d'attention."



"La France est en guerre contre le terrorisme", affirmait le Premier ministre au lendemain des attentats de Charlie Hebdo. Mais peut-on faire la guerre avec une parole de reddition? Là où la guerre exige une parole performatrice et unie, nous nous enfonçons dans une parole éparpillée de débâcle. Faisons d'abord le constat d'une distribution et d'une temporalité confuse de la parole politique. Le Président prend la parole avant d'avoir les éléments concrets de l'attaque du Bataclan. Il s'exprime au milieu de la nuit après Nice. Son Premier ministre fait le 20 heures juste après. Finalement, c'est François Molins que les Français écoutent avec le plus d'attention et de confiance.

Si guerre il y a, réservons au Président la hauteur, la rareté et la détermination de la parole. Qu'il ne s'abaisse pas à répondre des banalités aux provocations des candidats américains. Cette parole-là est insignifiante, elle abîme notre capacité à la recevoir. Et en parallèle, donnons plus de place au ministre de l'Intérieur sur les détails des opérations. Qu'il soit une référence pour l'opinion parce que c'est lui qui dirige les forces de police, sans que le Président ne craigne pour sa visibilité personnelle et sa réélection.


"D'un discours nous attendons des solutions pour agir plutôt que des prétextes pour subir."



La parole politique doit nous offrir un choix. Depuis trop longtemps, la parole politique est un gagne-pain, un outil de gestion de carrière des élus. Il devient douloureux de faire référence aux grandes paroles politiques de Clemenceau, du Général de Gaulle. Cette référence gaulliste est le bouclier oratoire de toute une partie de la gauche.

Pourtant, à quoi sert une parole politique si elle n'est pas capable de créer des espaces d'action et de liberté pour les individus? Les grands discours sont devenus des dispositifs d'occupation des médias. Alors qu'ils devraient être des catalyseurs d'énergie, des ressorts de l'action collective. D'un discours nous attendons du réconfort, du courage, des solutions pour agir plutôt que des prétextes pour subir. D'une parole politique, nous attendons qu'elle restaure le peuple et sa capacité de choix éclairé.

Face au terrorisme, le rôle des politiques est de nous interroger sur l'évolution du contrat civil. Par ce contrat, les individus se sont regroupés, sacrifiant un peu de liberté pour plus de sécurité physique. A quels sacrifices sont prêts les Français aujourd'hui? Comment peut-on actualiser notre Etat de droit et notre perception de la sécurité? Chaque sensibilité à la responsabilité de nous proposer sa vision de l'équilibre entre le sacré de la liberté et le sacré de la vie humaine, sans sensationnalisme et sans arrière-pensée politicienne. On connaît bien la proposition de l'extrême droite. Le reste de l'hémicycle n'a pas encore eu le courage de la clarté et de la consistance. Pas de choix possible dans une parole politique vacillante et opportuniste.

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