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«Il faut de la volonté et des sacrifices pour réussir»

Il y a vingt ans presque jour pour jour, Noureddine Morceli, triple champion du monde, est devenu champion olympique du 1500 m à Atlanta. Un titre qui manquait à son riche palmarès, surtout après sa déception aux JO de Barcelone, où il avait terminé 11e.
Parlez-nous de votre cuisante défaite aux JO-1992. Que s’est-il passé exactement ?

Au cours de ma participation aux JO, je n’étais pas en possession de mes qualités physiques. Je n’étais pas au top car je revenais d’une blessure qui m’a gêné. En participant aux Olympiades de Barcelone, j’étais classé 8e au bilan mondial avec un temps de 3’34. Mes adversaires avaient de meilleures références.  

Quatre ans plus tard, vous avez réussi à relever le défi à Atlanta. Est-ce que cela était dans vos cordes sachant la présence du champion olympique en titre, l’Espagnol Fermin Cacho, du Marocain Hicham El Guerrouj, etc. ?  

 Aux JO d’Atlanta, j’étais confiant et serein compte tenu des excellentes performances que j’avais signées au cours de l’année 1996. Je n’avais pas le droit de décevoir le peuple algérien, qui attendait avec impatience mon sacre olympique. Cela dit, je n’ai pas sous-estimé mes principaux adversaires.

Mais il paraît que lors de l’échauffement vous avez ressenti une forte douleur aux ischiojambiers qui a failli vous empêcher de prendre part à la finale...

C’est vrai, j’ai ressenti une douleur à la cuisse, mais sans gravité. Mais après quelques lignes droites, j’étais assuré qu’il n’y avait de grave.
Et à propos de l’incident qui s’est produit en pleine course, où le Marocain El Guerrouj a chuté...

Comme je l’ai annoncé à l’époque, ce genre d’incident peut se produire dans les courses, notamment tactiques. Aux JO de Barcelone, du sang coulait de ma jambe  car un coureur kényan m’avait touché avec les clous de sa chaussure.


Quel est le meilleur souvenir de votre carrière ?

Sans réfléchir, mon meilleur souvenir c’est lorsque j’étais le premier coureur algérien ayant réussi à battre le record du monde en salle du 1500m (3’34’’16) lors du 3e Championnat du monde d’athlétisme, en 1991, qui s’est déroulé à Séville, en Espagne. Le titre de champion du monde et le record m’ont motivé, puisque quelques mois après j’étais sacré champion du monde du 1500 m (en plein air) à Tokyo (septembre 91).

Avez-vous avez bénéficié de grands moyens pour atteindre vos objectifs ?

Oui. Je ne le nie pas, l’Etat algérien a mis tous les moyens à ma disposition afin que je puisse m’entraîner dans les meilleures conditions. C’est vrai, je ne recevais pas de bourse de préparation à temps, mais cela ne m’a pas empêché de travailler durement aux entraînements.Quant il y a de la volonté, tout va bien.

D’après vous, y a-t-il actuellement davantage de moyens par rapport à votre époque ?

J’ai connaissance que les pouvoirs publics soutiennent les athlètes d’élite. Certes, la prise en charge est importante. Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi de la volonté et des sacrifices pour réussir. Hassiba Boulmerka et moi-même avons passé des moments difficiles à l’époque de la décennie noire. Tous les deux nous avons fait preuve de sacrifice pour honorer les couleurs du pays. Je passais douze mois à l’étranger, entre la Suisse, les Etats-Unis et le Mexique, pour me préparer sans voir ma famille ni les amis. Je n’osais pas couper la préparation pour être parmi les miens en Algérie.

Avec du recul, pouvez-vous nous confirmer le kidnapping de votre frère ?

Exactement. Quelques semaines avant les Championnats du monde de Tokyo, mon frère a été kidnappé. Personne ne m’en a informé, même mon frère et entraîneur Abderrahmane. Mes parents n’ont pas voulu m’annoncer la mauvaise nouvelle afin de ne pas perturber ma préparation.

Lorsque je l’ai appris par la suite, je me suis effondré.

A deux jours  du coup d’envoi des épreuves d’athlétisme aux JO de Rio, est-ce que Taoufik Makhloufi est capable de conserver son titre sur 1500 m ?

Bien évidemment, même si je ne connais pas son état de forme actuel. Makhloufi a des chances de conserver son titre au Brésil. La finale sera ouverte. Makhloufi ne doit pas commettre les mêmes erreurs qu’aux Mondiaux de Pékin 2015. La course sera tactique. Il doit faire preuve d’une grande prudence en évitant la précipitation. Contrairement aux JO-2012, Makhloufi sera surveillé de très près par les trois coureurs kényans.  

Pensez-vous que Makhloufi a le rythme du 1500 m dans les jambes vu qu’il reste sur une seule course (Monaco le 15 juillet dernier) durant toute l’année ?

C’est son choix, bien qu’il aurait été préférable de disputer au moins deux à trois courses sur 1500 m avant Rio pour retrouver ses sensations et surtout prendre confiance. Peut-être qu’il a axé sa préparation sur le 800 m pour travailler sa vitesse.

Allez-vous partir demain à Rio en compagnie des anciens médaillés olympiques algériens pour assister aux épreuves d’athlétisme ?

J’aurais aimé être présent à Rio, mais en raison d’obligations familiales, j’ai renoncé à faire le déplacement.

Un commentaire concernant les derniers scandales de dopage qui ont ébranlé l’athlétisme mondial...

Il faut prendre des mesures rigoureuses pour lutter contre le dopage. Pas d’impunité avec les tricheurs. Je suis pour la radiation à vie des athlètes reconnus coupables de dopage.

Les sanctions de 2 ou 4 ans n’ont pas arrêté ce fléau. A mon époque, des athlètes s’étaient dopés, mais avec la complicité de certains, ils n’ont jamais été sanctionnés.

L’IAAF, présidée par l’ancienne star anglaise Sébastien Coe, doit être plus sévère. En Algérie aussi, on ne doit pas être laxiste face à ce fléau du dopage qui commence à faire parler de lui.

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