Avec Timothée Joly, le rock a de beaux jours devant lui

Après “International : 1 + 138”, “Plastique (Europe)” et “Ultramondiale amertume”, le Parisien revient avec un quatrième EP. Cette nouvelle création l’affirme toujours plus comme l’un des plus brillants inventeurs de musique de l’Hexagone.

À défaut d’avoir le droit à un album – attendu avec une impatience non feinte –, chaque nouvelle sortie discographique (aussi preste soit-elle) de Timothée Joly ne manque jamais d’irriguer le moulin de nos attentes, de charrier tout un tas d’idées pour le futur (et le présent) de la musique française, tout en envoyant valser nos certitudes. Plus qu’un réservoir d’inventions et de promesses, chaque EP de Timothée Joly ressemblait jusqu’alors à un monde de poche – avec ses sonorités, sa mythologie, sa langue, quasiment son organisation sociale.

Si Les Reflets argentés, son quatrième maxi en six ans depuis International 1 + 138 (2018), ne fait pas exception, il semble, pour la première fois peut-être, opérer un semblant de continuité et d’expansion en battant le même fer rock que son prédécesseur, Ultramondiale amertume (2022).

Rock transhumain

Une nouvelle itération pas si anodine au regard de la fuite en avant stylistique qui caractérisait la carrière de Timothée Joly, et qui fixe désormais sa musique dans un monde de guitares saturées et bodybuildées (d’où la présence de Dimitri Tikovoï de Trash Palace ou d’Olly Burden, ex-guitariste de tournée pour The Prodigy) : un rock transhumain qui irait de Linkin Park à Nine Inch Nails en passant par Yves Tumor.

Pourtant, loin d’abandonner son goût pour l’expérimentation et le mélange des genres qui irradiait sur International : 1 + 138 (2018), Plastique (Europe) (2021) et Ultramondiale amertume (2022), Les Reflets argentés (2024) est toujours un manifeste de musique libre qui rappellerait presque l’esprit aventureux de certains de ses contemporains francophones comme Hubert Lenoir ou Bonnie Banane. Presque, puisqu’à l’idée d’une musique-fleuve défendue par ces derniers, Timothée Joly, lui, substitue une musique brutaliste, à vif et aux angles acérés. Un itinéraire bis vers la même direction : une musique en lutte, qui montre les muscles pour son émancipation.

Musique de lutte

En investissant sa lutte contre les idées noires d’une imagerie totalitaire à fuir dans le clip d’Oxygène pur. En concaténant la mythologie d’Icare et le mirage du capitalisme tardif dans un format punk (l’expéditif Je peux plus voir ma face). En convoquant l’espoir nihiliste des dystopies du siècle précédent sur l’angoissant Métal parlant, qui faire survivre l’idée que la liberté est un sport de combat sans relâche, il construit un édifice sonore écrasant, une structure à démanteler, à réduire en pièces, à faire dérailler et à reconfigurer en musique.

Si chez Timothée Joly les lendemains sont souvent gris, Les Reflets argentés ouvre la porte à des jours meilleurs pour le rock en français : un futur alternatif – dans tous les sens du terme – fait d’audace, de doute et de lutte, en somme de rage contre la machine.

Les Reflets argentés de Timothée Joly (Because). Sortie le 4 juillet.

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