Léna Kurbiel, reine des océans à seulement 17 ans !
À peine sortie de l’adolescence, Léna Kurbiel, une jeune fille de 17 ans, a déjà inscrit son nom dans les annales du sport nautique. Depuis juillet dernier, elle est la plus jeune femme de l’histoire à avoir traversé l’océan Pacifique à la rame. Un exploit, réalisé en duo avec la navigatrice australienne Liz Wardley, 44 ans. PAR RUBEN DIAS. Extrait du WOMEN SPORTS N°34.
Léna Kurbiel. Un nom désormais gravé dans le basalte. À seulement 17 ans, la jeune aventurière n’a pas su dire non à l’appel du Pacifique. Le 8 juin dernier, elle s’est présentée, en duo avec l’Australienne Liz Wardley, au départ de la course World’s Toughest row (WTR) – Pacific. Une traversée à la rame, sans assistance, pour rejoindre Hawaï depuis la Californie. « 4 500 km d’endurance extrême », souffle, soulagée, Léna, quelques jours après son arrivée en France, « c’est la course la plus folle et la plus intense que j’ai faite ! »
Partir là-bas…
Traverser l’océan à la rame, « il faut être fou ! ». C’est ce que nous nous sommes dit aussi. Mais pour la jeune Léna, aucun rêve n’est assez fou. Alors, quand Liz Wardley s’offre l’Atlantique l’hiver der- nier, Léna s’émerveille : « pourquoi pas moi. Je l’ai contactée. » De son côté, Liz planifiait déjà la traversée du Pacifique et cherchait une partenaire. « Je me suis proposée, moitié pour la rigolade, moi- tié en espérant sincèrement qu’elle me considère (rires) ».
Préparation express
Évidemment, si on vous raconte l’histoire, c’est que Liz Wardley a dit oui ! La Française est tenace mais n’a pas le temps de jubiler : elle doit caser deux ans de préparation en quatre mois. Autre problème, malgré des échanges téléphoniques, les deux femmes ne se sont jamais rencontrées. Ce n’est arrivé qu’en avril, en Angleterre. « C’était l’unique opportunité de voir si nous étions compatibles, confie-t- elle. Passer presque 40 jours confinée sur un bateau avec quelqu’un que tu ne peux pas saquer, ce n’est pas la meilleure des idées ».
« Nous avons eu deux semaines pour apprendre à nous connaître. À ramer de jour comme de nuit (la WTR exige que les équipages aient ramé ensemble un minimum de 120 heures, dont 72 heures de nuit, ndlr.). » Une rencontre intense pour la double championne de France de voile et d’aviron.
Une famille d’aventuriers
En pleine préparation pour le bac, la lycéenne troque ses livres de révisions pour des cours de navigation, de survie en mer et de radio VHF. Elle poursuit tout de même ses cours au lycée, ses entraînements d’aviron et la recherche de sponsors. Dans sa famille, les « Re- tourne réviser ton bac ! » sont devenus « Rien n’est impossible. Le chemin est aussi une destination », lui lance son père. « Je leur suis très reconnaissante pour ça », confie l’athlète.
Il faut dire que dans la famille Kurbiel, on s’y connaît en matière de défis. Si on demande le grand-père, Janusz, « il a fait 37 expéditions polaires ». Le papa, « l’a accompagné plusieurs fois alors qu’il avait à peine mon âge… C’était naturel d’hériter de cette histoire familiale d’aventuriers », en sourit Léna.
« Des dauphins, des baleines… »
Début juin, à Monterey, Léna et Liz prennent le large. L’embarcation, accompagnée par les « magnifiques » otaries et autres loutres, s’enfonce dans les grosses vagues. Un paysage idyllique plein de dangers. « Le début a été marqué par des conditions météo très difficiles, notamment le vent. Je me suis fait éjecter de mon siège et nous avons cassé du matériel », s’inquiétait-elle avant de poursuivre, « le premier jour, nous avons ramé près de douze heures à deux avec peu de pauses. Puis un système a été mis en place : deux heures en solo, deux heures de repos. Les jours où les conditions étaient plus difficiles, c’était 1h30 en solo, 45 minutes ensemble, et une heure trente de repos. »
Pendant cette traversée sans assistance, Léna n’avait pas non plus d’eau courante. « Je me suis lavée les cheveux pour la première fois 21 jours après le départ et pris une « douche », avec un seau, après le 30ème jour ». Heureuse- ment, le défi sportif n’était pas le seul point positif du voyage.
L’immensité de l’océan a ses raisons et n’hésite pas à offrir aux deux athlètes un spectacle époustouflant. « Nous avons eu des dauphins qui jouaient dans la proue de notre bateau, vu un espadon, et même côtoyé une baleine énorme ! », se remémore Léna encore impressionnée par la taille du cétacé.
La fatigue physique des deux jeunes femmes ne leur a pas empêché de rire à propos de chaussettes raides, de se régaler de Mac and Cheese et même de « composer une chanson ensemble. Au-delà de la course, c’était une aventure humaine incroyable. »
Alors que la ligne d’arrivée approchait, la nourriture commençait à manquer. « Chaque kilo emporté dans le bateau compte, nous avions rationné au maximum… Il était temps que la course se termine. »
Moins de 40 jours plus tard…
Après 37 jours, 16h et 33 minutes en mer, l’embarcation accoste enfin au large d’Hawaï. Cinq heures après le bateau vainqueur (avec un nouveau record du monde au passage). Si juste après le débarquement Léna semblait un poil déçue du résultat, aujourd’hui elle avoue, « c’est un exploit énorme. Je suis la plus jeune (femme et homme, ndlr.) à avoir effectué cette traversée. »
À 4 500 km de la Californie et 12 324 km de la France, l’arrivée de nuit a été pleine d’émotions pour Léna et sa famille, qui a fait le déplacement. Un retour à la vie réelle savourée… « À Kauai, nos hôtes avaient vu ma vidéo à propos des M&M’s cacahuètes, et ils m’ont offert un énorme pot de M&M’s. Un régal (rires). »
Léna ne compte pas s’arrêter là. Si elle se concentre sur son bac, décalé en septembre, les aventures devraient s’enchaîner. « Le défi de l’Atlantique m’appelle. Et, j’ai de plus en plus envie de marcher dans les pas de la famille Kurbiel et partir à la découverte des deux pôles, Nord et Sud », conclut-elle, le sourire aux lèvres.